Myriam Leroy
Myriam Leroy Journaliste, chroniqueuse, écrivain

21.45 LA UNE

D’ OLIVIER NICKLAUS.

Dans son dernier film, Somewhere, Sofia « pauvre petite fille riche » Coppola ne dit pas vraiment autre chose: la star contemporaine est moins une déesse qu’un pion, un outil, un maillon de la chaîne alimentaire, une pelle à dollars manipulée par des industries en quête de visibilité. Voilà la démonstration de ce documentaire qui commence comme un sujet gossip de la chaîne à potins E!, qui va crescendo et se termine presque comme un film carcéral. Où les taulards porteraient du Balenciaga ou du Valentino, quand même. Le red carpet n’est pas qu’un simple tapis: c’est l’inventeur d’un époustouflant marketing de la célébrité. Il y a 50 ans, le podium ultime, c’était la sortie d’avion, moyen de transport rare réservé à l’élite. Aujourd’hui c’est le revêtement des marches du Palais des festivals de Cannes et celui qui pénètre dans la gueule béante du Kodak Theater de Los Angeles. L’enjeu du tapis rouge est colossal. Pour la vedette: mettre en scène l’image iconique qu’elle veut laisser à la postérité (loin de celle, en marcel et tongues, qui s’étale dans les magazines). Pour les marques: donner envie. Pas nécessairement de haute couture, mais au moins de sacs, de parfums, de lunettes. Il faut que le grand public (gavé de  » Gucci! »,  » Prada, what else? » et  » Chanel! » lancé aux journalistes chiffons dont la question récurrente est  » What are you wearing today?« ) se surpenne à rêver de paillettes, quel qu’en soit le prix.

Panneaux pub vivants

Les petits arrangements entre amis sont donc légion sur la planète Hollywood. Karl Lagerfeld donne des robes à Anna Mouglalis, Chanel bombarde Penelope Cruz de fringues et d’accessoires… Et les joailliers, qui se partagent un juteux marché sur le red carpet, dégainent le chèque à 6 chiffres pour que Madonna, Charlize Theron ou Sharon Stone paradent avec leurs rivières de diamants. Contrepartie: les célébrités doivent relever leurs cheveux, histoire de ne pas masquer les parures. Transformées en panneaux publicitaires vivants, elles s’exécutent d’aussi bon c£ur que ces pratiques peuvent passer à leurs yeux pour du mécénat. Anna Mouglalis et Monica Bellucci affirment ainsi qu’elles leur permettent une indépendance financière qui leur laisse la lattitude nécessaire pour choisir leurs films en fonction de leurs envies et non de leur cachet.

Un film d’Olivier Nicklaus, qui, comme sa récente et très remarquée Nudité toute nue, s’amuse à gratter le papier glacé avec panache et mordant.

MYRIAM LEROY

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