Queer British Art 1861-1967

© The Critics (1927) © Henry Scott Tuke

Tate Britain, Millbank, à Londres. Jusqu’au 01/10.

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Ce n’est pas tous les jours que le rainbow flag flotte sur le toit de la Tate Britain. Un symbole fort à l’heure où la cause LGBTQ nécessite d’être défendue bec et ongles. En cause, le 50e anniversaire de la décriminalisation partielle de l’homosexualité masculine. À cette occasion, la vénérable institution britannique consacre une exposition au Queer British Art, comprendre aux différentes expressions artistiques -britanniques- qui ont au centre de leur propos les questions de genres et de sexualité. L’accrochage fait valoir deux pans très significatifs. Le premier concerne les artistes qui ont évolué dans un contexte social où les mots « lesbienne », « gay » ou « trans » n’avaient pas cours. Cette période, que l’on peut grosso modo situer avant 1895, c’est-à-dire en amont du retentissant procès d’Oscar Wilde, donne lieu à des oeuvres inattendues, extrêmement émouvantes. Les codes n’y sont pas encore figés. Les représentations en question sont vibrantes, loin de l’image que l’on peut se faire de personnalités asphyxiées par le carcan victorien. Les artistes, peut-être mieux que les quidams, faisaient preuve d’un don particulier pour parvenir à être eux-mêmes malgré tout. On pense tout particulièrement au travail d’un Simeon Solomon, artiste préraphaélite juif et homosexuel, dont le dessin The Bride, Bridegroom and Sad Love fend le coeur et illumine l’exposition à la manière d’un soleil noir. Il donne à voir un marié embrassant sa future épouse tout en tenant amoureusement derrière lui la main d’un autre homme. Pudique et tendre. L’autre volet de Queer British Art montre des « pointures » de la reconnaissance d’une identité sexuelle plus complexe que « un papa, une maman ». Francis Bacon, David Hockney, mais également la sublime toile de Dora Carrington représentant l’écrivain Lytton Strachey, membre fondateur du Bloomsbury Group, avec lequel elle vécut une vie tout sauf ordinaire. C’est peut-être la leçon à retenir: plutôt que de qualifier le comportement des membres de la communauté LGBTQ de « pas normal », il faudrait dire « non ordinaire ». Il y a un monde fascinant -celui que permet d’entrevoir l’exposition- entre les deux.

www.tate.org.uk

M.V.

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