Prodiges et miracles

Le vieux Jim Falls n’a pas la vie facile: son élevage de poulets n’endigue plus les dettes, sa fille junkie va, vient et disparaît, et surtout lui laisse son petit-fils à éduquer: Quentin, adolescent métis, mutique et mal dégrossi, sans père, le nez souvent collé dans les comics quand ce n’est pas dans la colle. Un miracle va se produire, comme l’indique le titre:  » La jument blanche fit son apparition un lundi. Ni le grand-père ni le petit-fils n’avaient la moindre idée de qui l’avait envoyée. » Or dans le Midwest paysan, même les miracles ont des relents de tragédies… La jument, bête merveilleuse et taillée pour la course, va attirer bien des convoitises, obligeant le duo à traverser une Amérique rurale et oubliée. Un chemin de croix qui sera pourtant celui, aussi, d’une rédemption mutuelle… Après l’Illinois dans Le Blues de la harpie, Joe Meno gratte la terre de l’Indiana dans ce Prodiges et miracles. Celui que Hubert Selby Jr. qualifie d' » orfèvre flamboyant » confirme ici l’excellente impression laissée par sa première traduction, il y a un an: un amour contrarié pour l’Amérique profonde, des dialogues aussi fins que nombreux, une écriture fluide et parfois poétique… Et si l’effet de surprise s’est estompé et que le road-movie s’enlise parfois dans des longueurs, il reste à nouveau, bien après la lecture, des personnages forts et attachants, tels ce duo familial ou cette fratrie de bras cassés, première d’une longue liste à s’emparer du cheval:  » Il y a un raz-de-marée qui vient. Il est chargé de sang et d’entrailles, et j’ai bien l’intention de le surfer, pas de me faire engloutir. »

de Joe Meno, Éditions Agullo, Traduit de l’anglais (USA) par Morgane Saysana, 384 pages.

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