L’ex-agent 007 Pierce Brosnan joue un ex-Premier ministre dans The Ghost Writer? Un personnage directement inspiré par un certain Tony Blair. Et une prestation de classe pour le comédien irlandais, désormais citoyen… américain.

« Toutes les pistes menaient à Tony Blair! » Nous sommes à Berlin, dans le plus fameux hôtel de la ville, à quelques pas de la Porte de Brandebourg et de ses souvenirs de Guerre froide. L’élégance décontractée de Pierce Brosnan, surface de charme sous laquelle pointe une détermination palpable, renvoie immanquablement au personnage le plus fameux de la filmographie de l’acteur: James Bond, qu’il interpréta dans 4 films entre 1995 et 2002. Aujourd’hui, pourtant, c’est un autre rôle qui occupe l’attention. Celui d’Adam Lang, ancien Premier ministre britannique aux abois dans l’excellent thriller politique de Roman Polanski, The Ghost Writer ( lire notre critique en page 30). Et, de fait, toutes les pistes menaient bel et bien vers Tony Blair, « modèle » du personnage imaginé par Robert Harris dans le roman qui sert de socle au film. D’où une préparation  » basée sur cette analogie, sur les discours de Blair, ses apparitions publiques, pour en faire mon miel mais sans tenter de reproduire l’attitude de Michael Sheen (voir encadré) qui réussit pratiquement à « être » Blair! »

 » Monsieur Roman Polanski est un homme assez malicieux pour avoir vu l’ironie qu’il y aurait à prendre un Irlandais pour jouer le rôle d’un ex-Premier ministre Britannique, sourit Pierce Brosnan. Et un ex-James Bond, de surcroît! Il y a évidemment de l’humour dans cette décision. C’est du moins comme cela que je l’ai compris quand on m’a proposé ce personnage. » L’invitation à rejoindre The Ghost Writer est venue comme une divine surprise pour le comédien de 56 ans, pas trop habitué aux  » films à forte charge dramatique et politique« , ni aux cinéastes majeurs comme Polanski.

 » La perspective de pouvoir travailler un jour avec ce grand artiste était la dernière chose qu’aurait pu détecter mon radar!« , plaisante celui qui a aimé  » le défi posé par le film et le rôle« .  » Je m’attendais aussi, depuis le début, à ce que le contenu politique ait un écho, qu’il fasse jaser, même si je n’imaginais pas que Tony Blair soit appelé à répondre de décisions qu’il n’aurait jamais dû prendre, d’une guerre qui n’aurait jamais dû avoir lieu, au moment précis où apparaît le film… »

« On tourne »

Encore moins attendue, et forcément choquante, fut l’expérience de voir Polanski incarcéré puis mis en résidence surveillée.  » Je repensais à la vie extraordinaire et terrible qui fut la sienne, aux temps tragiques et troublés qu’il a vécus… Mais chaque matin, c’est à Tony Blair que je devais repenser à travers mon personnage!« , commente un Brosnan désormais citoyen américain.  » Après plusieurs années passées à vivre et à travailler aux Etats-Unis, je me suis fait naturaliser expressément à cause de la politique de l’administration Bush, poursuit l’acteur, pour avoir une voix au chapitre et exercer mon droit de vote en espérant aider au changement. Je n’oublierai jamais le jour où ma femme est allée voter à l’élection présidentielle, et que cet homme, George W. Bush, est arrivé au pouvoir, avant de changer nos vies. Et au soir de sa réélection, je me suis dit qu’il fallait que je puisse voter moi aussi à l’élection suivante, parce que c’en était trop… Je ne voulais plus me sentir impuissant dans un pays où j’avais ma carrière, ma résidence, mes enfants!  » Pour autant, Pierce Brosnan affirme  » n’avoir rien d’une créature politique » et « juste vouloir me comporter en citoyen responsable. »

De la direction de Roman Polanski, le comédien explique qu’elle  » ne vous permet jamais de relâcher votre attention. »  » J’ai eu droit, dès le premier jour, à mon baptême du feu, se rappelle-t-il avec un sourire. Je savais que j’allais débarquer sur le tournage le lundi, avec une petite scène apparemment facile. Mais le vendredi soir, il me téléphone, me dit à quel point il sera heureux de m’accueillir sur son plateau, puis me demande si cela ne me dérangerait pas de commencer plutôt par la scène de l’avion, le moment clé, la confrontation décisive entre mon personnage et celui joué par Ewan McGregor! Bon, ok, je prépare la scène pendant le week-end et le lundi je me pointe sur le set. Pendant des heures, Polanski s’occupe de tout (jusqu’au moindre détail du décor et des accessoires) sans s’occuper le moins du monde des acteurs. Un peu déconcerté, je demande à Ewan si c’est toujours comme ça et il me fait simplement « Oui » . Et puis, tout à coup, juste après le déjeuner, Polanski crie « On tourne! » . Il m’assied sur un siège de l’avion, prend la caméra, me la met presque dans la figure avec une lentille de 27 et c’est parti. Ewan en face de moi, Polanski et sa caméra qui nous scrute l’un puis l’autre à quelques centimètres de nous. Je n’avais jamais vécu quelque chose de pareil! C’était le moment de me dire que si j’étais là, c’est que je devais posséder un certain talent, et de donner tout ce que j’avais en moi. Le soir, j’ai pu respirer. Ce qu’on avait fait était bon! »

Rencontre Louis Danvers

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