TROIS FILMS NOIRS SONT ARRACHÉS À L’OUBLI, EN AUTANT DE VARIATIONS D’UN GENRE QUI FIT FLORÈS DANS LES ANNÉES 40. PÉPITES EN SÉRIE…

L’Orchidée blanche

D’ANDRÉ DE TOTH. AVEC BARBARA STANWYCK, DAVID NIVEN, RICHARD CONTE. 1947. 1 H 29. ED: SIDONIS. DIST: BELGA.

Impitoyable

D’EDGAR G. ULMER. AVEC ZACHARY SCOTT, LOUIS HAYWARD, MARTHA VICKERS. 1948. 1 H 45. ED: SIDONIS. DIST: BELGA.

Le passé se venge

DE ROBERT FLOREY. AVEC JOHN PAYNE, ELLEN DREW, SONNY TUFTS. 1949. 1 H 26. ED: SIDONIS. DIST: BELGA.

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Les amateurs du genre s’en réjouiront: les éditions Sidonis exhument, dans la bien nommée collection « Perles noires », un trio de films noirs aujourd’hui bien oubliés, autant de curiosités réalisées à la fin des années 40, et proposées dans des versions restaurées. Tourné en 1947 par André De Toth, l’un des borgnes de Hollywood et l’auteur de quelques mémorables westerns comme La Rivière de nos amours ou La Chevauchée des bannis, L’Orchidée blanche (The Other Love, en vo) est un mélodrame sur lequel les fleurs immaculées répandent un parfum funèbre. Venue soigner sa tuberculose dans un sanatorium suisse, une concertiste de renom s’y trouve tiraillée entre deux amours, son docteur dont la prévenance semble dissimuler quelque secret, et un pilote automobile au charme ravageur. Et d’inexorablement se consumer, au gré d’une intrigue que De Toth aborde avec un mélange de retenue et d’élégance feutrée, que couronne une certaine ambiguïté. Soit un écrin choisi pour l’exceptionnelle Barbara Stanwyck qui, encadrée des excellents David Niven et Richard Conte, ôte toute mièvrerie au propos…

Deux films, surtout, ont valu à Edgar G. Ulmer d’être l’objet d’un culte cinéphile fervent: le noir Detour, et un western remarquable, Le Bandit. Impitoyable (Ruthless) est d’un autre tonneau, puisque le réalisateur d’origine autrichienne y retrace le destin de Horace Vendig (Zachary Scott, incroyable), arriviste prêt à tout sacrifier -amours, amitiés et relations d’affaires- pour bâtir un empire de la finance. Virulent dans son propos (bien que non crédité, Alvah Bessie, l’un des « Dix de Hollywood », avait cosigné le scénario), le film s’appuie sur une construction en flash-back aussi habile que caractéristique, se répandant dans un climat de désolation morale dont le pendant est la cruauté -on pense à The Wolf of Wall Street de Martin Scorsese, que Ruthless préfigure, la démesure en moins.

Troisième titre de la série, Le passé se venge (The Crooked Way) est le fait de Robert Florey, prolifique cinéaste français émigré à Hollywood. Rentré amnésique de la Seconde Guerre mondiale, Eddie Rice (John Payne) gagne Los Angeles à la recherche de son passé, lequel n’en finit pas de se dérober avant de se révéler criminel. Soit un ressort classique pour un film noir mineur s’il n’ajoutait à son intrigue l’extraordinaire photographie de John Alton, l’un des maîtres du noir et blanc. Bonus appréciable, chaque film bénéficie d’une triple présentation, aux incontournables Bertrand Tavernier et Patrick Brion s’ajoutant François Guérif. Le trio rivalise d’érudition pour resituer chaque oeuvre, dans une mise en perspective fouillée, achevant de faire de cette collection un régal…

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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