Ancien flic reconverti dans le cinéma, l’acteur et réalisateur Olivier Marchal continue avec Braquo (lire notre critique en page 56) à explorer le côté obscur des forces de police dans une nouvelle histoire de poulets façon vinaigre. Explications.

Braquo était, à la base, un projet de long métrage. Pourquoi une série télé à l’arrivée?

Disons que quand j’ai commencé à travailler sur cette idée, je me suis rendu compte qu’il y avait énormément de choses à raconter. Et qu’avec seulement 1 h 40 ça allait être hyper frustrant. Un jour, je discute de ça avec un ami producteur, et il me dit qu’il a justement rendez-vous avec Canal dans la foulée. Il m’a rappelé l’après-midi même pour me dire qu’ils étaient preneurs. Donc je me suis retrouvé, quasi malgré moi, à travailler sur une série. Et plus j’écrivais plus je prenais du plaisir. Il a alors été décidé que j’allais aussi la réaliser. La seule condition c’était que je la fasse en 35mm, avec une équipe de cinéma, deux réalisateurs de cinéma ( Marchal et Frédéric Schoendoerffer, ndlr). C’était une façon, d’emblée, de se démarquer de toutes ces séries policières qui existaient déjà. Après, bien sûr, il fallait que les histoires soient à la hauteur…

Des intrigues où on sent également ce désir de se démarquer du tout-venant télévisuel du genre?

Tout à fait. L’idée ici c’était d’être au c£ur de cette petite tribu de flics qui subissent la mort de leur chef de groupe. Et de raconter comment cette mort peut provoquer une onde de choc sur ceux qui restent, et les amener à basculer. Donc je m’intéressais plus à la bascule, c’est-à-dire à des flics qui dérapent et qui passent de l’autre côté, qu’aux enquêtes en elles-mêmes, qui sont annexes ici, qu’on suit au coup par coup, avant de revenir invariablement vers le parcours personnel de ces types, leur descente aux enfers.

Il y a un véritable sentiment d’amour-haine par rapport au métier de flic qui transpire de Braquo comme de 36 Quai des Orfèvres ou MR 73 que vous avez réalisés précédemment…

Oui. Durant les dernières années où j’étais dans la PJ, j’avais vraiment le sentiment que ce n’était pas nous qui ne voulions plus de ce métier, mais le métier qui ne voulait plus de nous. On a cru en quelque chose, en une mission: être aux services des autres, se rendre utile. Puis on se rend compte assez vite qu’on est juste des pauvres cons manipulés par la hiérarchie, et qu’on nous demande tout sauf de faire ce métier comme il faudrait le faire. Aujourd’hui, je parle de gens qui continuent de faire semblant d’y croire parce que c’est ce qu’ils ont choisi, qu’ils ne veulent pas reconnaître qu’ils se sont plantés. Pour moi, ça a été très dur d’arrêter, même si je faisais déjà un peu de théâtre à l’époque. J’avais peur de ne plus être flic, de ne plus faire partie de cette tribu à part. Parce que j’étais fier d’être flic. Il y a vraiment une idée de fraternité, d’entraide: on tient parce qu’on est tous dans la même merde. Sans ça, la moitié des flics se flingueraient…

Dans votre travail, on ressent une volonté d’esthétisation de tout ce milieu, mais couplée à un désir de sonner juste, crédible…

C’est-à-dire que mon travail dans son ensemble n’est pas réaliste. Tout est fantasmé: les voitures, les décors, les looks. C’est outrancier et assumé. Mais par contre, dans les actions, le comportement des flics, la façon dont ils sortent une arme, parlent, je tiens absolument à ce que ce soit réaliste. Car ce sont ces petites choses qui, alliées au fantasme, font qu’on y croit. Xavier Beauvois, avec Le Petit Lieutenant, a fait dans l’hyperréalisme, et c’est vachement bien. Seulement je m’adresse plus au grand public. Alors je recherche une unité artistique entre les décors, la lumière, le jeu, les costumes, qui fait passer la dragée jusque dans les outrances. Un peu, toutes proportions gardées, comme chez Sergio Leone, une de mes grosses influences avec Melville.

En parlant d’influence, Braquo cultive de nombreux points communs avec The Shield, la série US de Shawn Ryan. Pure coïncidence ou héritage revendiqué?

Je regardais The Shield tous les dimanches soirs sur 13e Rue. J’étais au taquet. Et j’ai pensé: d’où ça sort cet ovni? ça m’a tellement marqué, c’est tellement bien foutu, que, oui, je me suis dit que j’allais faire un The Shield à la française. Dans l’esprit du moins: montrer des flics bad boys. Après, ça m’a aidé aussi à l’écriture. A chaque fois que je me freinais, je pensais: mais eux ils osent tout, alors allons-y!

Avec, à la clé, un succès en France qui garantit déjà un Braquo, saison 2…

Pour 2011, oui. Mais je ne peux rien dire. J’avais déjà une idée de suite dans ma tête, à vrai dire. Pour le coup, ça va plus aller vers 24 heures chrono. Une histoire de chasse à l’homme. Mais j’ai le droit de rien dire, vraiment…

Braquo, à suivre dès ce lundi 18/01 à 20.45 sur Be 1.

Rencontre Nicolas Clément

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