Les Reflets changeants

D’Aude Mermilliod, Éditions du Lombard, 196 pages.

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Elsa a la tête ailleurs: elle pense au beau et ténébreux Micka dont elle est follement amoureuse. Il est plus âgé et la fait se sentir belle. Avant lui, notre coeur d’artichaut de 22 ans ne s’assumait pas: trop ronde, trop timide… Mais ce bonheur cache aussi une réalité moins glamour car Micka devient esclave de chaque drogue, médicament ou spiritueux qui passe à sa portée. En attendant, pour le voir, elle fait le trajet en train entre Nice où elle habite et Cannes où il réside. Jean, lui, est le conducteur du train qui longe la côte d’Azur. La cinquantaine bien tapée, il porte beau. Papa d’une petite fille de sept ans, il est séparé de sa femme, une belle italienne. Les deux parents s’entendent bien, mais Jean a du mal à concilier sa vie amoureuse et sa paternité. Un soir de déprime, il partage une clope avec Émile, un vieux qui promène son spleen dans la gare. Le promeneur oublie son journal intime sur un banc et Jean se met à le lire. Il y découvre la vie d’un pied noir peu sympathique et frustré d’avoir dû quitter son pays pour la métropole. Il a développé depuis un sentiment de haine face aux Arabes. Pendant que Jean lit le journal, le lecteur apprend qu’ Émile est sourd, qu’il se sent de plus en plus isolé par son handicap et que malgré l’amour qu’il porte aux siens, des pulsions suicidaires se font de plus en plus pressantes. Ces trois personnages ne se connaissent pas, mais leurs vies vont s’entremêler… Aude Mermilliod s’est librement inspirée de la vie de son grand-père, né à Alger en 1935, autour de laquelle elle construit un récit choral avec tendresse, sans artifices ni effets de manches. La jeune auteure manque peut-être encore un peu d’assurance dans le traitement de ses personnages mais, quoi qu’il en soit, la fondation Raymond Leblanc ne s’est pas trompée en lui attribuant le Prix de la Jeune Création.

C.B.

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