Les Années manquantes

L’âge venant, Jean-Noël Pancrazi retourne à nouveau sur les territoires de l’enfance, après avoir arpenté, dans Je voulais leur dire mon amour, celui de la terre algérienne quittée 50 ans plus tôt au sortir justement de ses jeunes années. Avec Les Années manquantes, il revient cette fois sur celles d’adolescence et de jeune adulte. Confié à une grand-mère maternelle catalane française qu’il ne connaît pas, il admire le frère maternel, ancien militaire revenu d’Indochine puis d’Algérie également vaincu par la vie, et qui sombre, tel un Titanic, en se saoulant de nuits blanches. Le second retour de ses parents pieds-noirs, chassés à nouveau d’Algérie du fait des nationalisations, est l’occasion d’un autre divorce, cette fois entre une mère qui elle aussi s’octroie enfin la liberté et l’indépendance, et un mari perdu, devenu apatride, orphelin de celle qui était son seul pays. Usant à merveille de ses prodigieuses facultés mnésiques, la description d’un séjour du petit « orphelin » chez les bourgeois bienveillants de Perpignan se révèle à la fois poignante et proustienne. Pancrazi pratique la phrase longue, marathonienne, sans jamais s’essouffler, en laissant le point de côté. Au travers de ce panégyrique familial, l’écrivain ressuscite ses proches coupdésormais lointains et enterre son chagrin.

De Jean-Noël Pancrazi, éditions Gallimard, 112 pages.

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