Léa Mysius

Avec Léonor Serraille, Caméra d’or pour Jeune femme, elle est l’une des belles révélations françaises de cette 70e édition.

À 28 printemps à peine, elle a co-signé le scénario des Fantômes d’Ismaël d’Arnaud Desplechin qui a fait l’ouverture de Cannes, présenté son premier long, Ava, à la Semaine de la Critique et s’apprête à écrire le prochain film d’André Téchiné. Excusez du peu. Il y a moins de trois ans, Léa Mysius était encore sur les bancs de La Fémis, école nationale supérieure des métiers de l’image et du son à Paris, orientation scénario. Sur la Croisette cette année, son nom était déjà pourtant sur toutes les lèvres, comme un sésame qu’on s’échangerait de files en files, de salles en salles, pour augurer de quoi sera fait le cinéma de demain.

« Dans l’écriture, je travaille énormément sur les dialogues dans une optique multi-couches, pour que le film offre plusieurs niveaux de lecture, avec beaucoup de sous-entendus, d’éléments latents« , nous expliquait l’intéressée au beau milieu de son marathon promo cannois. Démonstration avec Ava, soit la transposition à l’écran de son scénario de diplôme de fin d’études, où une jeune adolescente en vacances se prépare à perdre la vue tout en faisant l’apprentissage de sa propre émancipation. Une histoire de toutes premières mais aussi de toutes dernières fois. « C’est un film qui parle beaucoup du regard. Désirer et être désirée. Voir et être vue. En soi, ça relève quasiment du méta-cinéma ces questions-là. C’était important pour moi que mon premier film se frotte à ça. »

Gratter l’inconscient

Si le résultat dans son ensemble ne convainc pas encore totalement, il se montre peu avare en jaillissements fulgurants où la fantaisie la plus débridée côtoie le réalisme le plus grave. C’est certain, Léa Mysius a tout pour réaliser un jour un grand film. La scène d’ouverture d’Ava est déjà, en soi, un pur geste de cinéma, où le parcours a priori innocent d’un chien noir sur une plage de vacanciers se drape d’un étonnant voile d’inquiétude. « Le scénario est né de cette image-là. Comme le film prend la forme de la chronique d’un été, avec tout ce que ça implique, en principe, en termes de naturalisme, je voulais d’emblée injecter de l’étrangeté. Entrechoquer le côté sur-coloré de la plage pleine de chair, de crème solaire, et quelque chose de plus déroutant, un danger sous-jacent. Orchestrer la rencontre entre Martin Parr et Josef Koudelka, en somme. » Un mix très libre d’humeurs et de genres qui s’accompagne d’un travail grinçant sur les sons, les matières, et une musique presque atonale, chaotique, qui confine par endroits à quelque chose de très agressif. « L’idée, vraiment, c’est d’aller gratter l’inconscient. »

Son deuxième long métrage, elle n’y songe pas encore. Après avoir co-signé le scénario du dernier Desplechin, elle s’apprête donc à attaquer celui du prochain film d’André Téchiné. « Le producteur d’Arnaud est directeur du département de production à La Fémis. La connexion s’est faite comme ça. Quant à Téchiné, je l’ai rencontré pour la première fois il y a quelques jours. On m’a appelée tout récemment pour que j’écrive pour lui. Je ne sais pas trop pourquoi moi. » Euh, vraiment?

N.C.

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