BLANCANIEVES EST LA DERNIÈRE EN DATE DES NOMBREUSES LECTURES DE BLANCHE-NEIGE, LE CONTE DES FRÈRES GRIMM AYANT CONNU DE MULTIPLES DÉCLINAISONS CINÉMATOGRAPHIQUES.

« Le scénario de Blancanieves est un « conte des contes »: Le Petit Chaperon rouge apparaît dans le livre que son père lit à Carmencita; Cendrillon est présente par la façon dont la marâtre fait travailler la petite; le coq Pepe est le lapin blanc d’Alice, celui qui l’emmène de l’autre côté; Pinocchio est là avec le personnage de Stromboli/Don Carlos; La Belle au Bois Dormant… J’ai tout mis dans un shaker et cela a donné mon Blancanieves », explique le réalisateur Pablo Berger dans sa note d’intention. Profondément originale et, partant, d’autant plus stimulante, la relecture de Blanche-Neige qu’il propose ne s’inscrit pas moins dans une tendance lourde du cinéma qui a trouvé dans le conte une manne providentielle. Et cela tous horizons confondus, la proposition englobant aussi bien Jack the Giant Slayer de Bryan Singer qu’Agnès Jaoui allant Au bout du conte, pour ne mentionner que deux exemples parmi les plus récents d’adaptations, littérale pour l’une, détournée pour l’autre.

A bien des égards, Blanche-Neige, le conte des frères Grimm, apparaît emblématique de cet intérêt soutenu du Septième art, qui en cumule aussi bien les attendus -soit, en général, une première interprétation Disney (celle-ci, Blanche-Neige et les sept nains, datant de 1937), résultant en une vision ayant imprégné durablement l’imaginaire de plusieurs générations de spectateurs- que les multiples possibilités, sous forme de relectures les plus diverses. Ainsi, cette transposition audacieuse de l’histoire dans l’Espagne des années 20 en constitue la troisième version en un peu plus de douze mois, le film de Pablo Berger succédant aux hollywoodiens Mirror Mirror, de Tarsem Singh, et Snow White & the Huntsman, de Rupert Sanders, en autant de mises en perspective différentes.

Si le cinéaste espagnol s’affirme comme le tenant d’une démarche autant esthétique que sensorielle atteignant ainsi à quelque grâce intemporelle, ses homologues américains auront, pour leur part, veillé à reprofiler leur Blanche-Neige suivant les canons du moment. Le premier, en faisant d’elle une adolescente cherchant sa place dans le monde, le second en ravalant le conte au rang de blockbuster de série revisitant le sempiternel combat du Bien et du Mal. Avec, d’ailleurs, ce que cela suppose de dégâts collatéraux, l’histoire s’en trouvant comme vidée de sa substance, et ne parlons même pas de l’âme. Signe des temps, c’est toutefois cette dernière version qui a écrasé le box-office américain, Charlize Theron remportant haut la main le combat des marâtres qui l’opposait à Julia Roberts. Du conte au mécompte, il n’y a parfois qu’un pas, ce dont Hollywood n’a visiblement cure, qui a déjà annoncé un Snow White & the Huntsman 2 où Kristen Stewart retrouvera ses habits de princesse.

C’est que si les contes ouvrent aussi une porte sur l’inconscient et l’imaginaire, Blanche-Neige y occupe une place à part, que citait encore récemment Sam Raimi dans Oz the Great and Powerful après que Tim Burton l’avait habilement détournée dans une pub pour les Hollywood Chewing Gum, pour l’installer dans un paradis où le fruit défendu avait une saveur inédite de chlorophylle…

J.F. PL.

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