Le roi des cons

Après un détour par les romans graphiques, Tronchet revient à ce qu’il sait faire de mieux: le con, avec des gags de la même veine.

Il n’est jamais trop tard pour redevenir un con. Prenez Tronchet, par exemple. Lui qui a pour ainsi dire inventé la connerie en bande dessinée, avec des personnages mythiques comme Jean-Claude Tergal, Jésus, Raoul Fulgurex ou Raymond Calbuth dans les années 80 et 90, avait oublié ces dernières années d’être drôle. Quelques romans graphiques voire biographiques aux magnifiques couleurs directes dans des collections prestigieuses ( Vertiges de Quito chez Futuropolis, Le Fils du Yéti chez Casterman) l’avaient éloigné de ce qu’il a fait de mieux pendant des décennies: le gag bête, tellement bête qu’il en devient génial, et en dit finalement long sur l’état de la pensée occidentale avec ses personnages pathétiquement stupides et surtout heureux de l’être. Or, à l’heure où 20 % de la population croit toujours à la théorie de la terre plate, pas facile d’être plus con que les vrais cons! Il était donc temps que Tronchet s’y remette, même à quasiment 60 balais. Avec deux cons qui en rappellent quelques autres, y compris dans le propre panthéon de l’auteur.

Bien de leur époque

Quand Ducon & Ducon font leurs courses, ils ont peur de se faire sauter à cause du gaz de chips. Quand ils visitent les pyramides d’Égypte, ils en concluent rapidement que celles-ci formaient en réalité le premier terrain de camping du monde ( « Est-ce que tu vois les toilettes du Roi, toi? Une kitchenette? La pharaonne devait faire à bouffer dehors, un barbecue, et le pharaon devait chier dans les bois. »). Et quand ils voient deux chiens se renifler les fesses, ils penchent pour la seule explication qui s’impose:  » Dans le trou de balle, il y a toutes les informations sur leurs collègues, alors que nous, on a un tas de paperasses, passeport, identité, carte vitale… Ce serait mieux si les flics devaient nous renifler le cul! »

Le roi des cons

Bête donc, mais finalement pas tant que ça, via deux personnages au passé plus lourd que leur QI: l’un s’appelle Patacrèpe, l’autre Couillalère, comme dans les deux albums éponymes réalisés en 1998 avec Gelli, puis plus tard en solo et chez Fluide avec Deux cons, réédité aujourd’hui et dans lequel les compères dénonçaient déjà quelques complots et vérités insoupçonnées sur le génocide des raviolis et l’extinction des dinosaures. Une fabrique de fake news à eux seuls, pour deux cons donc finalement bien de leur temps. Et si Tronchet n’atteint plus les sommets d’une Bite à Urbain et qu’il s’égare parfois dans des gags plus « politiques » qui lui siéent moins, on le remercie quand même de s’y remettre: un peu de bêtise, quand elle est assumée, ça fait toujours du bien.

Les Ducon & Ducon

De Tronchet, Éditions Fluide Glacial, 48 pages.

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