Laisse la mer entrer

Au marché, Barbara Balzerani, autrefois leader des Brigades Rouges dans la section de Rome (pan majeur qu’elle interroge dans Camarade Lune), continue à être secouée par la mainmise des puissants. Il lui faut alors reprendre le fil de son héritage, inscrire son nom dans la lignée de  » celles qui étaient déjà aux champs le lendemain de leur accouchement, leur dernier-né au sein« . Comprendre en quoi sa mère, paysanne mise tôt à contribution productive, s’accrochait à sa joie d’aller à l’école grâce à un instituteur émancipateur alors même que jusqu’alors  » personne n’avait jamais raconté les voyages d’une Ulysse femme » et que seul le curé détenait la clé des histoires, faites de privations en prévision d’une hypothétique vie éternelle. Il lui faut mesurer en quoi concilier le monde familial des champs et celui du savoir créait une tension que Balzerani elle-même expérimenterait différemment, déjà davantage déconstruite par sa possibilité de voir ailleurs comment le monde tourne. Ces échos d’une génération à l’autre sont pour l’autrice la confirmation de combats viscéraux déjà menés, moins tapageurs mais non moins essentiels et c’est avec autant d’émotion lyrique que de colère -pas tout à fait éteinte par son propre sentiment de défaite latent- qu’elle en rend compte.

De Barbara Balzerani, éditions Cambourakis, traduit de l’italien par Laura Brignon, 112 pages.

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