La Vie folle

© ED VAN DER ELSKEN, PIERRE FEUILLETTE (JEAN-MICHEL) ET PAULETTE VIELHOMME (CLAUDINE) S'EMBRASSANT AU CAFÉ CHEZ MOINEAU, RUE DU FO

Ed van der Elsken, au Jeu de Paume, 1 place de la Concorde, à Paris. Jusqu’au 24/09.

Il était temps qu’un pays francophone -dommage que ce ne soit pas la Belgique- consacre une rétrospective à l’oeuvre géniale d’Ed van der Elsken (Amsterdam, 1925 – Edam, 1990), photographe néerlandais dont les images restituent avec intensité les quatre décennies qui ont suivi la guerre. Pour ceux qui connaissent mal son travail, c’est l’occasion de tordre le cou à un cliché, celui d’un photographe à l’horizon limité. Même s’il a toujours cité l’ouvrage Naked City de Weegee comme unique influence, son oeuvre ne se résume pas aux clichés très Nouvelle Vague de passants pris sur le vif à Paris ou à Amsterdam. Non, van der Elsken était aussi un aventurier qui a entrepris en 1959 un tour du monde, en compagnie de sa femme, Gerda van der Veen. Loin d’être l’oeil d’un quartier, celui du Nieuwmarkt -ses tenancières, ses marginaux- dans la capitale des Pays-Bas, l’homme à qui l’on doit Une histoire d’amour à Saint-Germain-des-Prés s’est frotté au monde: Sénégal, Sierra Leone, Afrique du Sud, Malaisie, Singapour, Hong Kong, Philippines, Japon où ils séjournent trois mois. Sans oublier le Mexique et les États-Unis, là où le voyage s’achève. Il n’est pas exagéré de dire que ces dépaysements ont marqué un véritable tournant dans l’oeuvre du Batave. C’est au contact de cette réalité qu’il va forger cette attention particulière, son intérêt pour la condition humaine. Un livre, La Douceur de vivre (1966), a témoigné de manière lumineuse de cette fascination pour les cultures étrangères. Il reste que le pan le plus magnétique du travail de van der Elsken est celui qui induit une rupture avec la photographie documentaire de l’après-guerre. Il est parmi les premiers à poser son objectif parmi l’or brut de la jeunesse. Bien décidé à ne pas rater une miette de ses fougueuses addictions et de sa violence, il a su capter comme personne l’impétuosité du désir. C’est ce qui le rend vibrant, même 27 ans après sa disparition.

www.jeudepaume.org

M.V.

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