En 2007, Panda Bear ouvrait son troisième album, sur la pochette duquel des gosses et des animaux se serrent dans une piscine de jardin, par un titre obsédant et mouillé intitulé Comfort in Nautica. Si Noah Lennox est passé maître dans l’art de la pop aquatique, l’eau a de tout temps flirté avec la musique que ce soit en tant qu’outil ou que source d’inspiration.

Du tambour d’eau, percussion africaine traditionnelle, au waterphone, inventé à la fin des années 60 et souvent utilisé au cinéma pour susciter le malaise ou évoquer l’inconnu (Lalo Schifrin a eu recours à ses services pour les BO de L’Inspecteur Harry et d’Amityville), en passant par l’orgue hydraulique, qui plaisait beaucoup aux Romains, et le water gong, utilisation moderne de gongs et tamtams, elle s’est ainsi fait instrument. Laissant par ailleurs libre cours aux imaginations débridées et aux bricoleurs farfelus.

Evoqué, reproduit, imité, le bruit de l’eau s’est très tôt infiltré dans l’histoire de la musique. Par exemple chez Chopin (La Goutte d’eau), Debussy (La Mer, Reflets de l’eau), Ravel (Jeux d’eau), Vivaldi (La Tempesta di mare)… A travers les siècles, les compositeurs ont même été invités à composer de la musique destinée à être jouée sur l’eau. Que ce soit les canaux vénitiens ou la Tamise tel Handel écrivant pour une fête de George I en 1717. De nos jours, on va jusqu’à parler de concerts subaquatiques. Un type d’écoute qui existe depuis les années 80 et a été imaginé en Californie.

« Presque tous les endroits où j’ai vécu étaient proches de l’océan, explique le Lisboète d’adoption Panda Bear. Quand je suis au milieu des Etats-Unis ou d’un continent, je ne me sens pas aussi à l’aise qu’au bord de l’eau. Grâce à elle, j’ai l’impression d’être chez moi. Comme protégé. La musique est sans doute quelque part un moyen de me plonger volontairement et autrement dans cet univers. »

Une inclinaison personnelle qu’il lie au dub. « J’adore l’album Volcacity de Luomo, ce projet de Vladislav Delay, housy mais aquatique. Plusieurs disques de John Maus aussi. Je parlerais alors d’eaux tristes. Mais la quintessence du disque mouillé, c’est incontestablement pour moi The Roots of Dub de King Tubby. La musique que je composais avant de découvrir le dub n’avait pas grand-chose à voir avec celui que je suis maintenant. J’imitais quelques trucs que j’aimais mais je n’avais pas encore compris qu’elle devait être une expression de moi. De ce que je suis. J’étais comme un violoniste qui joue des classiques. Je m’entraînais.  »

Rock, soul, jazz, pop… De (Sittin’ On) The Dock of The Bay d’Otis à The Rain d’Eddie Gale en passant par The River de Springsteen, Have You Ever Seen The Rain? de Creedence ou encore Down By The Water de PJ Harvey, la liste est interminable. Quand ce n’est pas via le son et la mer, c’est par les paroles, la métaphore, le ciel et la pluie que la musique se fait aquatique. « Je fais de la musique qui lave. De la musique dans laquelle tu peux te baigner et flotter« , résumait François (& The Atlas Mountains) Marry qui chante Je suis de l’eau et a intitulé l’un de ses albums Plaine inondable. Smoke on the water…

J.B.

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