MARK LANEGAN FAIT DES INFIDÉLITÉS À ISOBEL CAMPBELL ET GREG DULLI ET SORT BLUES FUNERAL, SON 1ER ALBUM SOLO (OU PRESQUE) DEPUIS L’INCONTOURNABLE BUBBLEGUM IL Y A 8 ANS. IL ÉTAIT TEMPS.

Il a des allures taciturnes de vieux loup solitaire. De bête coriace qui n’aime pas trop la meute. Cela faisait pourtant 8 piges que Mark Lanegan traînait sa voix caverneuse et sa carcasse de mec qu’on n’emmerde pas sur les disques des autres. Trois albums avec la douce Ecossaise Isobel Campbell de Belle and Sebastian, un groupe, The Gutter Twins, et un disque, Saturnalia, avec l’ancien Afghan Whigs Greg Dulli. Puis une tripotée de projets, d’Eagles of death metal aux Queens of the stone age en passant par The Breeders ou Soulsavers (liste non exhaustive), auxquels le briscard a accepté de prêter main forte… Lanegan ne se les est pas grattées dans son sofa en regardant les matchs de NBA (l’ex-Screaming Trees est mordu de basket) depuis la sortie du fabuleux Bubblegum.

 » Je n’ai jamais pensé que lui offrir un successeur prendrait tant de temps mais j’ai été tellement occupé par d’autres choses. Des choses qui me plaisaient avec des gens dont j’appréciais la compagnie. Je ne voulais pas décliner ces propositions. Et elles tombaient les unes à la suite des autres.  »

Lanegan a le rire facile. Est tout apaisé. Confortablement installé sur la banquette d’un luxueux hôtel bruxellois. L’Américain a le temps. Il reste chez nous pendant une semaine pour préparer sa tournée. Il y sera accompagné d’un band belge monté et emmené par son pote Aldo Struyf (Creature with the atom brain). Un groupe composé du guitariste Steven Janssens – » il joue notamment avec Daan dont, oui, je connais la musique« -, Jean-Philippe De Gheest de Joy as a toy derrière les fûts et Fred Lyenn à la basse.

 » Avec les Queens, j’essaie d’apporter ma petite touche à quelque chose qui est déjà génial. Je ne suis pas une nécessité. Même chose avec Isobel. J’essaie d’habiter les chansons. Je soutiens sa vision. Les Gutter Twins, c’est un partenariat, du fifty fifty, avec Greg Dulli. Par contre, tous ceux qui jouent sur ce nouveau disque et le défendront sur scène sont là pour soutenir ma musique. Et j’ai la chance d’avoir des amis qui sont de super musiciens et prêts à m’aider. Je savais que je demanderais à mes bons potes. Josh Homme, Chris Goss, Aldo… Même quand quelqu’un enregistre tous ses instruments comme Prince, ce n’est probablement pas un album solo. Tu vois ce que je veux dire? »

En regardant la pochette du nouveau Lanegan frappée du titre Blues Funeral ( lire la critique page 35), on se souvient que c’est de son amour pour les chansons du bluesman Leadbelly qu’est né The Jury, son duo avec Kurt Cobain à la fin des années 80. Projet qui n’a jamais abouti à une sortie discographique.  » On avait commencé à enregistrer un mini album mais en s’y attelant, l’entreprise a vite perdu de son intérêt. C’était du réchauffé. »

A 47 ans, Lanegan est en quelque sorte un survivant. La plupart de ses potes sont morts jeunes. Trop jeunes.  » Deux de mes amis les plus proches étaient des mecs d’Alice in chains et de Nirvana« , glisse-t-il au détour de l’interview. Et on devine qu’outre Cobain, c’est de Layne Staley, décédé d’une overdose d’héroïne et de cocaïne en 2002, qu’il s’agit.

Blues Funeral, c’est à Hollywood, dans le 11ad studio de son vieux pote Alain Johannes, qu’il l’a enregistré.  » On se connaît depuis très longtemps. On a joué ensemble dans les Queens. Plus que n’importe qui avec qui je pourrais travailler, il sait d’où je viens et où je veux aller. Il me comprend. » Les 2 hommes ont bossé au rythme de 2 jours par semaine. Pendant que Johannes épaulait les Black Box Revelation.  » Nice kids« , sourit-il.

 » Alain est créatif mais aussi très ouvert. Il ne veut rien t’imposer. Il est prêt à tout essayer. Beaucoup de mecs qui font comme lui ce job depuis des années vont t’envoyer bouler et te dire qu’ils savent ce qu’ils font. J’en ai rencontré des types comme ça. Dès que tu bosses avec d’autres, faut gérer les personnalités. Je suis sûr que si tu rencontrais certains de ces gars, ils te diraient que je suis un trou du cul intégral. »

Video Games

Souvent là où on ne l’attend pas, Lanegan, qu’on a du mal à imaginer s’acharner devant une console, a composé une chanson, Burning Jacob’s Ladder, pour le jeu vidéo Rage.  » J’ai joué quand j’étais ado mais c’était à l’époque de Pong … Quand, un jour, mes neveux m’ont demandé si j’étais branché video games, je leur ai parlé de cette proposition que j’avais déclinée. J’ai dû fouiller dans mon gsm pour retrouver le nom de Rage . Ils connaissaient déjà. Un an même avant sa sortie. Ils m’ont convaincu.  »

Quand la concurrence est rude, toute publicité est bonne à prendre. En ce compris revisiter Johnny Cash pour la B.O. de Very Bad Trip 2.

Si Mark Lanegan est fasciné par le cinéma, ce n’est pourtant pas par celui d’Hollywood. Lui qui vit au pied de ses collines. Une chanson de l’album est directement inspirée par la trilogie danoise Pusher de Nicolas Winding Refn. Le mec qui vient de réaliser Drive.  » Les 3 sont géniaux. Sans doute mes films préférés de tous les temps. Mais le 2e (l’histoire d’un petit criminel qui sort de prison et de relations père-fils difficiles, ndlr) trouve vraiment écho chez moi. La musique est géniale. Surtout l’instrumental Sad Disco que j’ai utilisé pour composer un autre morceau et écrire des paroles que le film m’a inspirées. C’est une sorte d’hommage. » Mark Lanegan en mérite bien un lui aussi… l

RENCONTRE JULIEN BROQUET

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