La Mise à mort de la licorne

À la fin des années 70, Peter Bogdanovich rencontre l’éblouissante Dorothy Stratten au fameux Manoir Playboy de Hugh Hefner. Coup de foudre absolu: ensemble, ils vivront une idylle d’une fulgurante pureté avant que Stratten ne soit torturée, violée, brutalement sodomisée puis assassinée par le mari dont elle était séparée. Concentré hyperbolique de beauté, de jeunesse et de douceur, sa trajectoire sacrifiée synthétise en un sens à elle seule le destin funeste réservé aux enfants chéries de l’Amérique telles que fétichisées par Hollywood. Vu de l’extérieur: les promesses extasiées de bonheur, de réussite et de gloire. Au-dedans: les sordides vicissitudes régies par des fantasmes masculins qui humilient, abîment et emprisonnent. Publié en 1984, mais pour la première fois traduit en français, l’ouvrage, roman-essai bouleversant d’inconsolable tristesse, se double d’un vibrant manifeste féministe et d’une féroce dénonciation d’une industrie masturbatoire broyeuse de vies, dont il s’avère bien inutile de souligner les troublantes résonances actuelles. Investi corps et âme, Bogdanovich y multiplie les parallèles entre sa vie et son oeuvre -il venait de finir They All Laughed (1981), sommet de comédie loufoque et sophistiquée qui fonctionne ici à la manière d’un miroir inversé. Sous sa plume transie, la mise à mort de la licorne Stratten est symboliquement celle de toutes les femmes.

De Peter Bogdanovich, 264 pages, Éditions Carlotta.

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