La Bonne Vie

Au coeur de l’émulation artistique des années 30, un petit groupe venu de Reims débarque à Paris avec à sa tête un jeune homme hâve au visage d’ange échu. Canne à pommeau, porte-cigarettes, traits pâles et tirés par les longues nuits, le nom de leur chef de file: Roger Gilbert-Lecomte. Il est ce chahuteur présent mais déjà ailleurs: la littérature projette sur lui son ombre inquiète, tandis que la création, muse cruelle, se joue de lui. À ses côtés, ses frères Robert Meyrat, Roger Vailland et le plus important de tous: René Daumal. Jeunes et brillants, les quatre mousquetaires griffonnent des vers et rêvent leur vie en buvant des Picon-bière. Haïssant plus que tout les certitudes, ils bouillonnent: « (…) fuir les petits-bourgeois et les écoles de commerce, fuir la petite femme et les amicales du dimanche, fuir la pipe et le tapis moelleux, la messe et le 14 Juillet. » Cherchant à percer le mystère d’une réalité inconnue, plus vaste et plus achevée, ils courent les forces obscures: les bars, la nuit, l’opium et la roulette russe. Le « nous ne sommes pas au monde » de Rimbaud pour credo, les voici qui fondent un manifeste et de grands espoirs. Il est urgent de réinventer! La création d’une revue, Le Grand Jeu, enclenche bisbrouilles puis rupture consommée avec les surréalistes: Aragon, Queneau et ce vieux lion de Breton. Dédicacé à la mémoire du chanteur Daniel Darc, ce premier volume d’une trilogie autour de la thématique Créer/détruire (à venir: un roman sur Toulouse-Lautrec) tente de réponde à la question: « Pourquoi écrivons-nous? » D’une voix forte et tremblante, Matthieu Mégevand dessine la trajectoire d’un dandy élégant, brillant et dédaigneux. Et les boyaux qui fulminent, nom de Dieu!

De Matthieu Mégevand, éditions Flammarion, 160 pages.

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