L’OEil de l’État

Jusqu’il y a peu, James C. Scott était un nom comme un autre -celui d’un universitaire savant, dont les travaux sur les origines des civilisations humaines n’intéressaient guère que ses collègues directs, fascinés ou irrités par ses thèses iconoclastes. Mais le succès de Zomia (La Découverte, 2013), son livre consacré aux territoires vivant à l’écart de toute mainmise étatique, puis de Homo Domesticus (La Découverte, 2019), sa relecture incendiaire de la « révolution néolithique », ont changé la donne. Soudain, Scott est devenu une des figures chéries de ceux qui s’interrogent sur les raisons pour lesquelles il y a quelque chose de pourri dans notre monde. L’OEil de l’État, publié en anglais en 1998, constitue la fondation de ce travail consacré à la mise à jour de l’Histoire longue des destructions occasionnées par les pouvoirs à partir du moment où ils ont voulu se transformer en institutions. Multipliant les exemples de planification ratée, Scott décrit l’échec répété des États, des origines à nos jours, pour faire advenir depuis le haut quoi que ce soit qui ressemble à une véritable amélioration collective -au contraire des savoirs locaux, situés et ancrés sur une expérience directe de l’environnement et du groupe. À la fois récit érudit, accusation implacable et appel à la réconciliation avec la ruse fondamentale des populations humaines, il n’a pas fini de faire causer.

De James C. Scott, éditions La Découverte, traduit de l’anglais (États-Unis) par Olivier Ruchet, 600 pages.

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