L’enfance de l’art

Mon voisin Totoro © studio ghibli

Un épais et fécond recueil compile de précieuses analyses filmiques destinées à mieux accompagner l’expérience de l’enfant spectateur.

S’aventurer au cinéma signifie beaucoup plus que s’évader. Surtout pour un enfant.” De 1994 à 2018, une association d’éducation artistique à l’image -Les enfants de cinéma- a mené, en France, une réflexion sur les films et le jeune public. Structure ressource dans les domaines de la pédagogie et du cinéma, elle a joué un rôle important de passeur de la connaissance et de l’amour du 7e art, afin que les enfants puissent véritablement appréhender ce dernier comme une ouverture au monde. Soit un projet qui, non content d’offrir une expérience singulière d’initiation aux regards, a aussi constitué au fil du temps un patrimoine exceptionnel de textes sur le cinéma à travers de précieuses petites monographies portant sur des films anciens ou plus actuels. Celles-ci étaient appelées des Cahiers de notes, et étaient offertes aux instituteurs comme matériel pédagogique pour accompagner les sorties de leurs classes au cinéma. Plus d’une centaine de ces cahiers ont vu le jour au fil des ans, exprimant à chaque fois le point de vue personnel d’un auteur sur l’œuvre envisagée.

Travaillés par une même question de départ (“ Que voit-on dans un film qui sera vu par un enfant lorsqu’il ira au cinéma?”), 30 de ces points de vue fournissent aujourd’hui la matière d’un épais et élégant recueil qui paraît aux éditions Yellow Now. Sous-titré Des films pour l’enfant spectateur, l’ouvrage, richement illustré, limpidement mis en pages, propose des analyses fouillées, jamais bêtement didactiques, qui ouvrent des portes de compréhension et renforcent le plaisir du cinéma. Elles traitent aussi bien du Kid de Charlie Chaplin ou des Vacances de Monsieur Hulot de Jacques Tati que d’ E.T. l’extra-terrestre de Steven Spielberg ou de Tomboy de Céline Sciamma, de Chantons sous la pluie de Stanley Donen et Gene Kelly ou de La Prisonnière du désert de John Ford que de Mon voisin Totoro de Hayao Miyazaki ou de L’Étrange Noël de Monsieur Jack de Henry Selick… Portées par la conviction que “ l’art contribue à rendre lisible le chaos du monde”, elles sont signées par des pointures telles que Charles Tesson, Michel Marie, Alain Bergala, Jacques Aumont, Rose-Marie Godier ou encore Xavier Kawa-Topor. Parmi d’autres.

© National

Présentés par paires, les films y communiquent entre eux, se répondent les uns aux autres, pour une grande célébration plurielle du cinéma dans son rapport à l’enfance -qu’elle soit regardée ou regardante. Un peu comme si, à travers la toile du grand écran, les héros de celluloïd tendaient la main à destination des têtes blondes pour les inviter à mieux grandir en leur compagnie. Un geste utopique, et souvent fantasmé, mais logique, somme toute, puisque, comme le rappelle Hervé Joubert-Laurencin, qui dirige ce très fécond ouvrage collectif, “ le cinéma est tout entier une expérience du devenir”.

De Zéro de conduite à Tomboy

Ouvrage collectif sous la direction d’Hervé Joubert-Laurencin, éditions Yellow Now, 488 pages.

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