ELLE A ÉCRIT SON NOUVEAU FILM POUR UNE CATHERINE DENEUVE QUI SE RÉGALE DU CADEAU. EMMANUELLE BERCOT FAIT D’ELLE S’EN VA UN HYMNE À UNE FÉMINITÉ LIBRE, À 60 ANS COMME AVANT…

Son road-movie file à belle allure, au gré d’un désir vital que Catherine Deneuve exprime idéalement. Derrière la caméra, Emmanuelle Bercot capte avec justesse cet itinéraire intime. Elle-même actrice (elle a notamment joué dans La Classe de neige, A tout de suite et Polisse) passée avec bonheur derrière la caméra (La Puce, Backstage, Mes chères études, entre autres), Bercot n’aurait pu imaginer Elle s’en va sans son interprète principale…

Quelle est l’origine du film?

Le film n’a qu’une seule source: le désir de tourner avec Catherine Deneuve. Une irrépressible envie d’écrire pour elle, mais vraiment sans autre idée au départ. Je ne voulais me donner aucune limite. En rêvant à ce que pourrait être le film, j’ai vu Catherine sur une route, au volant d’une voiture. C’est comme ça qu’est venue l’idée du road-movie.

L’avez-vous directement prévenue que vous écriviez pour elle?

Non, pas de suite. J’ai attendu d’avoir le sujet, l’histoire. Celle-ci est venue par petits morceaux, comme un puzzle. J’ai eu des idées, comme ça, à droite et à gauche. Le fait qu’elle soit une ancienne Miss, qu’elle ait encore sa mère (qu’on la voie donc en fille), de la filmer avec un enfant, de la découvrir dans des décors inhabituels… A un moment donné, j’ai su quelle structure pouvait accueillir tous ces éléments, comment ils pouvaient se mettre tous en place, et faire un tout. J’ai alors appelé Catherine…

L’accent mis sur l’âge du personnage ne l’inquiétait pas un peu, elle qui est une star et une icône du cinéma?

Nous n’en avons pas beaucoup parlé. A partir du moment où je voulais faire un film sur une femme qui a la soixantaine, il n’était pas question de tricher. D’autant que l’idée de l’âge est omniprésente dans notre société. On n’arrête pas de nous marteler qu’il faut rester jeune, qu’il ne faut pas montrer l’âge qu’on a… Je ne voulais pas évacuer le sujet. Dans la seule conversation que j’ai eue à ce sujet avec Catherine, elle m’a dit: « Je n’ai aucun problème avec l’âge que j’ai, mais je n’aime pas que mon âge soit stigmatisé. »

Elle considère que ce qu’elle vit est normal: on peut tomber amoureux à 60 ans, on peut souffrir à 60 ans, il n’y a aucune raison de définir les situations par rapport à l’âge. Bien sûr, quand on prend une icône comme elle, cela peut être amusant de placer dans la bouche d’un homme des réflexions peut-être primaires, mais qui disent tout haut ce que tout le monde pense tout bas, en faisant allusion à sa beauté passée. Je pouvais me le permettre avec Catherine car elle est tellement belle aujourd’hui que renvoyer à sa beauté passée ne diminue rien chez elle, tant elle est lumineuse!

Il y a le jeu très révélateur entre l’image de la toute jeune Miss et celle de la sexagénaire…

Catherine nous a donné une photo d’elle à 18 ans, et nous l’avons superposée à son visage actuel. Une manière de montrer que le personnage va vers un avenir peut-être encore plus prometteur qu’à l’époque de sa jeunesse.

Vous avez choisi de faire évoluer le personnage dans des décors qu’aurait pu employer Jacques Demy pour un de ses propres films…

J’avais cette envie un peu ludique de prendre Catherine Deneuve avec son image d’actrice et de la placer dans cette petite ville de province aux vitrines désuètes, façon Demy, puis de l’envoyer parcourir la France et rencontrer des gens de la vraie vie. Je suis heureuse que vous ayez remarqué ce parallèle que beaucoup ne voient pas.

Quels sont vos premiers souvenirs marquants de Deneuve, en tant que spectatrice?

J’ai certainement vu ses films pour Demy, petite. Mais ce dont je me souviens en premier, c’est de Catherine dans Le Sauvage (de Rappeneau, ndlr). Je devais avoir 8 ans, et là, j’ai vu LA femme! La femme absolue, avec sa voix qui a imprimé mon oreille d’enfant comme l’aurait fait un « tube ». Depuis, il n’y a pas eu un âge de ma vie sans que je sois impressionnée par un de ses films. On a cette impression très familière, avec elle. Cette impression qu’elle fait partie de notre vie, de notre famille. On rêverait de l’avoir tout à la fois pour mère, pour fille, pour soeur et pour amie.

RENCONTRE Louis Danvers

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