ENORME EN FLANDRES, ARSENAL SORT UN 4e ALBUM, LOKEMO, DISQUE ÉMOPOP CONÇU DANS L’IVRESSE, ET BRANCHÉ SUR LE CHAOS DU MONDE.

Et de 5! Après avoir rempli tranquillement 2 premières dates, en avoir rajouté une 3e, puis une 4e, ce sont finalement bien 5 Ancienne Belgique qu’Arsenal s’apprête à remplir. 5-0, score de forfait pour le groupe flamand, qui file directement en Ligue des champions. A ceci près: une fois passé le sillon Sambre-et-Meuse, Arsenal doit reprendre les choses à zéro. Scénario désormais classique: on peut être prophète en son demi-pays, et rester inconnu quelques kilomètres plus loin. Comment? Pourquoi? Les voies de Santa Belgica, et de son univers impitoyable, sont impénétrables. A moins que ce ne soit la musique d’Arsenal elle-même qui reste difficilement cernable pour le public francophone. Hendrik Willemyns, moitié bavarde du duo formé avec John Roan: « Même du côté flamand, on a du mal à nous coller une étiquette! ». De l’emopop alternative? Faute de mieux alors, manière de désigner des chansons à la fois instantanées et hors main-stream. Sentimentales et désincarnées. Calibrées et insaisissables.

Si l’identité d’Arsenal reste floue, c’est peut-être tout simplement à cause du drôle de binôme qui le compose, réuni à la base par une même passion pour le… metal. Soit à 1000 lieues des rondeurs de tubes comme Estupendo ou A Volta. A noter, aucun des 2 ne chante (Roan ne prend le micro que sur scène). A la place, une série d’invités, souvent improbables. Pour Lokemo, 4e album en date, le casting est formé notamment de Mike Ladd, figure du hip hop alternatif, Shawn Smith, héros oublié du grunge, Johnny Whitney, couineur hardcore au sein des Blood Brothers, ou encore Depotax, groupe… wallon, découvert dans un concours par Hendrik Willemyns, alors membre du jury.

Tournée générale

Lokemo, c’est le nom breton de ce coin des Côtes d’Armor où le duo s’est retrouvé pour jeter les bases du nouvel album. Et c’est peut-être là que l’on va en savoir un peu plus sur ce qui fait avancer Arsenal. Willlemyns: « On y est resté 2 semaines. On aurait pu rester plus longtemps, mais physiquement c’est lourd à porter. On boit pas mal quand on fait de la musique. Pour créer, on a besoin de se lâcher et l’alcool est l’instrument parfait pour ça. Mais à la fin, on commençait à avoir des tremblements… »

L’évasion donc, dans les vapeurs de l’alcool. Ou en prenant son sac pour se balader entre les continents. Pour le disque précédent, Lotuk, le duo avait séjourné en Norvège et bourlingué aux Etats-Unis. Lokemo a été nourri différemment. C’est Paper Trails, le projet télé conçu par Willemyns, qui les a amenés ailleurs. « Une émission littéraire. Chacun des 6 épisodes était centré sur un livre, avec des interviews, pas mal d’images, de musique. Un programme assez exigeant. « Geen voice over, geen bekende Vlamingen. « Pas forcément facile à vendre. «  Surtout placé le dimanche soir, en face du jeu De Pappenheimers, plus grosse audience de la télé flamande. Willemyns: « Pour parler du livre Things Fall Apart de Chinua Achebe, on s’est rendu au Nigeria, juste à nous 2, sans équipe. On nous avait déconseillé d’y aller, personne ne va là, et certainement pas dans l’intérieur du pays, dans les territoires Ibos. Cela peut être dangereux (ils s’y feront entre autres menacer par des militaires, ndlr). On s’est également rendu en Birmanie, au Japon, Mexique, Pologne… La réalisation de ce programme était une aventure en soi. « 

Est-ce parce que ce qu’ils ont vu du monde ne les a pas rassurés que Lokemo se fait plus tendu qu’à l’habitude, voire plombé par moment ( Fear of Heights)? Jusqu’à la pochette: une photo d’une cité HLM à Varsovie, prise de nuit. Willemyns: « La nuit a quelque chose de mélancolique et poétique. Mais aussi de très angoissant. Le sentiment de ténèbres… Le fait d’avoir beaucoup voyagé ces 2 dernières années a certainement joué, c’est clair. Voir énormément de choses, et se rendre compte que quelque chose est en train de basculer… Normalement, on devait se rendre au Caire. On n’a pas pu y aller. Aujourd’hui, c’est la Lybie… Et Sarkozy qui bombe le torse… Hey, on n’est pas non plus les good guys dans cette histoire, hein!… Et puis, regardez même simplement ce qui se passe ici… Quand vous parlez autour de vous, beaucoup de personnes ont ce sentiment-là. Que tout s’écroule. Things fall apart … Il y a tellement de gens stressés, amers, qui s’acharnent sur Internet, sur les forums. On y trouve une telle rage. Cela ne fait pas de Lokemo un Mezzanine (l’album quasi « gothique » de Massive Attack, ndlr) – certains nous disent même que c’est notre disque le plus dynamique. Mais ce chaos s’y retrouve certainement, en souterrain.  » De quoi commander… un petit remontant?

ARSENAL, LOKEMO, CHEZ PIAS. IL RESTE DES PLACES POUR LE CONCERT DU 21/05, À L’AB, BRUXELLES.

ENTRETIEN LAURENT HOEBRECHTS

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