Kubrick room

Des fans acharnés du mythique Shining de Kubrick en décryptent des soi-disant messages secrets. © © DR
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Room 237

DOCUMENTAIRE DE RODNEY ASCHER.

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Quelque 28 % des Américains croyaient en 2013 qu’une élite secrète internationale aspirait à un nouvel ordre mondial. 21 % étaient convaincus que le gouvernement couvrait depuis 1947 un crash d’ovni à Roswell. Et 15 % soutenaient que l’industrie de la santé inventait des maladies pour maximiser ses profits. Les États-Unis ont plus qu’un faible pour les sirènes du complot et les théories conspirationnistes. Les Amerloques aiment se faire des films. Et ce, même quand ils en regardent. Étrange et nerdy documentaire de Rodney Ascher, Room 237 décortique sous toutes ses coutures et ses coupures le Shining de Stanley Kubrick. Pas de making of ici, mais l’exploration de neuf théories gonzo imaginées et étayées par des fans à coups d’indices cachés et d’interprétations parfois solidement tirées par les cheveux.

L’un a vu un film sur les Indiens d’Amérique. L’autre pense que le réalisateur y avoue des prises de vue factices pour la Nasa. Aux yeux de certains, à partir d’une machine à écrire de marque allemande et d’un numéro, le 42, inscrit sur le sweat-shirt du petit Danny, le long métrage traiterait de la Seconde Guerre mondiale. « Si tu mets un 42 et une machine germanique ensemble pour un historien allemand, c’est synonyme d’holocauste. Parce que c’est à partir de ce moment (de 1942) que les nazis ont décidé d’exterminer le plus de Juifs qu’ils pouvaient. Et ils l’ont fait d’une manière mécanique, industrielle et bureaucratique. »

« Tissu d’inepties »

« Les vues et les opinions exprimées dans ce documentaire sont seulement celles des commentateurs qui y participent. Ils ne reflètent pas l’avis de Stanley Kubrick ni de ceux qui ont réalisé The Shining« , prévient Ascher (The Nightmare) en préambule à sa dissection. Leon Vitali, qui a joué dans Barry Lyndon et Eyes Wide Shut, considère le documentaire comme « un tissu d’inepties issues de l’imagination fertile d’esprits farfelus ». Quant à Stephen King, qui n’aimait pas l’adaptation de son roman par Kubrick, il a coupé sa télé après avoir vu la moitié du docu. Entre les mecs qui cherchent des aigles partout, ceux qui lisent dans les nuages et ceux qui ont superposé les images du film à l’endroit et à l’envers, on a par moments l’impression de recroiser le père d’un pote qui nous montre des lumières dans le ciel en nous annonçant l’arrivée proche des extraterrestres. Mais aussi anecdotique et frappé puisse-t-il être parfois dans ses théories, présentées en voix-off, Room 237 en dit long sur les fans obsessionnels de Kubrick et est ludiquement bien monté. Des emprunts à ses autres films illustrant çà et là l’humeur et les propos des zozos invités à s’exprimer. Vive le fétichisme.

JULIEN BROQUET

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