Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Kate cash – Avec son deuxième album, la jeune Anglaise donne du corps à sa pop, en la faisant régulièrement sortir de la route. Audacieux.

« My Best Friend Is You »

Distribué par Universal.

La tendance ne semble pas près de faiblir. Depuis plusieurs années maintenant (2006 pour être précis, date de sortie du Back To Black d’Amy Winehouse et du Alright, Still de Lily Allen), la pop made in UK se décline avant tout au féminin. Les filles prennent la main, et pas seulement en jouant la carte de la séduction. Ou en tout cas pas au point de brider leur personnalité derrière des personnages de poupées pop creuses. Et cela marche. Les professionnels sont d’ailleurs les premiers à y croire. Il n’y a qu’à regarder le sondage « Sound of » que la BBC organise chaque début d’année pour détecter qui fera l’actualité musicale des prochains mois. Ces 3 dernières éditions, les patrons de label, journalistes, hommes de radio… ont notamment parié sur La Roux, Florence & The Machine, Adele, Duffy, Little Boots, avant de miser cette année sur Ellie Goulding et Marina & The Diamonds…

A ce petit jeu-là, Kate Nash (née à Dublin en 1987, élevée à Londres) avait su parfaitement tirer son épingle du jeu. Son premier album, Made of Bricks, sorti en 2007, lui avait par exemple permis de venir titiller Lily Allen sur ses propres terres. Notamment grâce au single Foundations, exemple type de diary pop à la Bridget Jones. La question restait cependant de savoir si la demoiselle allait pouvoir doubler la mise au tour suivant ou au contraire s’appuyer sur ces… fondations pour partir sur autre chose. Manifestement, My Best Friend Is You, son second album sorti ces jours-ci, a choisi la dernière option.

La pop est toujours la plus intéressante quand elle arrive à glisser un grain dans la machine, de la personnalité dans une musique destinée à toucher le plus grand nombre. Partir du particulier pour parler de l’universel, voilà l’éternel défi du format. Les « petites Anglaises » qui se sont pointées en tête des charts ces dernières années l’ont bien compris. Parmi elles, Kate Nash a cependant décidé aujourd’hui de pousser le bouchon un peu plus loin et de voir ce que cela pouvait donner.

Riot grrrl

Le premier single, Do-Wah-Doo, ne bouleverse pas fondamentalement les règles du jeu. Avec son côté Shangri-Las (les ch£urs, les claps), il accroche directement l’oreille. Dès l’entame, Paris (et son reproche  » You’ll never listen to me » , répété en boucle) et Kiss That Grrrl prennent d’ailleurs le même pli. La patte certainement de Bernard Butler, seul à la production, et responsable à ce même poste de l’album de Duffy, déjà fort tourné vers les girls bands des années 60.

Mais Bernard Butler fut aussi le guitariste de Suede, groupe brit-pop parmi les plus flamboyants et ambigus des années 90. Du coup, quand KateNash a voulu aller voir plus loin, Butler aura certainement été le dernier à vouloir la brider. Dès Don’t You Want To Share The Guilt?, la jeune femme crée une brèche avec son histoire d’amour malade et dépressif (  » Thinking is one of the most stressful things« ). Plus loin, dans Mansion Song, elle part carrément dans un parlando hystérique. Parfois, on n’est pas loin de la posture un peu forcée ou gratuite -comme sur I Just Love You More et ses couinements à la Yoko Ono. Au bout du compte, My Best Friend Is You arrive cependant à maintenir un parfait équilibre entre le fond foncièrement pop de Kate Nash et ses incartades plus rêches. Et réussir ainsi dans le genre un des plus beaux exercices d’équilibriste de ces derniers mois.

En concert le 08/06, au Botanique, Bruxelles.

Laurent Hoebrechts

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content