Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

TROIS FILMS DES DÉBUTS, RESTAURÉS À MERVEILLE PAR LA CINEMATEK, ILLUSTRENT LE BEAU DÉMARRAGE DU RÉALISATEUR DE THE ASSASSIN.

Hou Hsiao-hsien – Early works

CUTE GIRLGREEN, GREEN GRASS OF HOMETHE BOYS FROM FENGKUEI. DIST: CINEMATEK.

8

A l’heure où paraît sur nos écrans son nouveau et très admirable film The Assassin (lire la critique page 19), un superbe travail de restauration mené par la Cinematek vient éclairer les débuts d’Hou Hsiao-hsien. Trois de ses quatre premiers longs métrages sont au rendez-vous de cette édition digitale exemplaire. Cute Girl (1980), Green, Green Grass of Home (1982) et The Boys from Fengkuei (1983) nous sont restitués en versions nickel, lavés des atteintes du temps et dès lors propres à témoigner de l’élan puis de l’envol d’un des plus grands cinéastes de notre temps. Seul manque à l’appel Cheerful Wind (1981), le deuxième film de Hou, qui s’inscrit dans la ligne « commerciale » de Cute Girl et Green, Green Grass of Home avant que The Boys from Fengkuei révèle en pleine lumière l’art de son réalisateur, annonçant la trilogie autobiographique qui allait le consacrer au firmament de la cinéphilie mondiale: Un été chez grand-père (1984), Un temps pour vivre, un temps pour mourir (1985) et Poussières dans le vent (1986).

S’il les écrit lui-même, les deux films les plus anciens n’en épousent pas moins trame et contours d’un spectacle grand public comme le cinéma taïwanais en produisait à l’époque en priorité. Cute Girl est une comédie sentimentale où une jeune fille de bonne famille préfère un garçon rencontré par hasard au fiancé choisi par son père. Green, Green Grass of Home suit un jeune instituteur remplaçant sa soeur dans une école de village. Le rôle masculin principal des deux films est tenu par Kenny Bee, chanteur pop en vogue auquel sont logiquement concédées des séquences musicales façon clip vidéo rompant l’action un peu comme à Bollywood… Mais des éléments propres à Hou Hsiao-hsien apparaissent comme l’étude des rapports entre ville et campagne, la nature menacée par un progrès parfois absurde (la route qui passe au milieu d’une maison dans Cute Girl…), la célébration de l’enfance et la détermination féminine face au pouvoir masculin. Le spectacle, aussi, le héros de Green, Green Grass of Home étant logé au-dessus d’un théâtre, et le film s’achevant sur le show « écolo » d’écoliers devenus défenseurs de la rivière locale.

Avec The Boys from Fengkuei, Hou se libère de tout carcan commercial pour chroniquer, façon I Vitelloni de Fellini, la vie de quelques jeunes gens habitant une petite ville côtière. L’observation sociale, la prise d’une juste distance, l’emploi très personnel du plan-séquence et de la profondeur de champ, et cette manière d’évoquer l’évolution de Taïwan à travers celle de héros quotidiens: ce qui fera la marque du grand réalisateur reconnu du Maître de marionnettes est déjà là, dans une expérience cinématographique lumineuse, inspirée, attachante. Grâce soit rendue à la Cinematek de nous offrir en coffret ce très précieux bonheur!

LOUIS DANVERS

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content