LE 14E FESTIVAL DE MARRAKECH RENDAIT HOMMAGE À L’ACTEUR BRITANNIQUE, QUE L’ON VERRA PROCHAINEMENT CHEZ BEN WHEATLEY, AVANT DE LE RETROUVER DANS BATMAN VS SUPERMAN.

Rejoignant d’un pas tranquille une terrasse ensoleillée de la Mamounia, Jeremy Irons semble parfaitement dans son élément. « Le festival est agréable, n’est-ce pas? » , commence-t-il avec l’assurance du connaisseur, lui qui était de la première édition de la manifestation marrakchie, en 2001, au lendemain des attentats du 11 septembre, avant d’en présider, deux ans plus tard, le jury courts métrages. L’acteur britannique entretient d’ailleurs un lien étroit avec le Maroc, puisqu’il y a encore tourné And Now… Ladies and Gentlemen, de Claude Lelouch, et Kingdom of Heaven, de Ridley Scott, avant donc d’être, aujourd’hui, l’objet d’un hommage dans le cadre du 14e festival de Marrakech. Un événement dont il se plaît à rappeler l’importance: « Dans le contexte présent, avec toute l’injustice qui semble présider à la marche du monde, les films, et les arts en général, peuvent exercer un rôle diplomatique, dépasser les clivages nationaux et culturels pour nous rappeler combien nous sommes semblables. La culture peut contribuer à améliorer la situation, ne serait-ce qu’en rassemblant des gens de tous horizons autour de films qui leur permettront d’apprécier ce que ressentent les uns et les autres, et ce qui peut les préoccuper. L’art n’a pas vocation à s’occuper du Moyen-Orient, mais plus il y a aura d’exemples de modération dans le monde, mieux on se portera ».

La rencontre constitue, par ailleurs, l’occasion de balayer un parcours construit sur la durée. « Tout va beaucoup plus vite désormais, et je pense qu’il est plus difficile pour les jeunes acteurs de poursuivre une carrière longue et stable« , observe Jeremy Irons. La sienne l’a conduit de La Maîtresse du lieutenant français, à l’orée des années 80, à Batman vs Superman, qu’il s’apprête à tourner pour Zack Snijder, en une sorte de grand écart qu’il assume d’ailleurs bien volontiers: « Comme acteur, j’ai toujours veillé à jouer la gamme complète. The Borgias, que j’ai tourné pour la télévision, Die Hard ou, aujourd’hui, Batman, sont des films qui touchent un public très large. Je ne voudrais pas me cantonner dans ce type de productions, mais elles peuvent se révéler bénéfiques, parce qu’elles attirent l’attention de spectateurs qui auront peut-être la curiosité d’aller voir ce que vous faites par ailleurs, et notamment ces films indépendants qui risquent, sinon, de passer inaperçus. Voilà pourquoi j’ai toujours veillé à placer, dans mon parcours, des films qui allaient me faire connaître d’un public plus nombreux, comme encore The Lion King (où il prêtait son timbre, reconnaissable entre tous, à Scar, ndlr). »

Sa filmographie atteste de cette volonté de diversité, où l’on retrouve, aux côtés de mastodontes à l’intérêt parfois discutable, un Moonlighting tourné au début des années 80 pour Jerzy Skolimowski, le Australia de Jean-Jacques Andrien, un High-Rise qu’il vient d’achever avec Ben Wheatley, ou encore Margin Call, de J.C. Chandor, un film qui disséquait admirablement les mécanismes du crash financier, et qu’il range parmi ceux ayant « compté » à ses yeux. Les autres étant La maîtresse du lieutenant français (« parce qu’il s’agissait du premier film majeur »), Dead Ringers et The Mission (« qui ont laissé une empreinte ») et Lolita, « dont j’ai toujours été fort fier, même s’il n’a guère été vu, en raison de son sujet. » L’acteur n’a jamais été effrayé par les rôles sulfureux, en effet, démonstration encore avec Reversal of Fortune (Le mystère von Bülow), de Barbet Schroeder, le film qui devait lui valoir un Oscar en 1991.

Des revers de fortune, Jeremy Irons est le premier à convenir en avoir connu de sérieux, sa carrière ayant tutoyé le calamiteux en plus d’une occasion –« C’est peu de le dire. Il y a eu notamment un film basé sur un jeu de société, Dungeons and Dragons, qui était vraiment ignoble, mais m’a valu un cachet considérable. A l’époque, je m’étais lancé dans de grands projets immobiliers (Irons a racheté et rénové le château de Kilcoe, en Irlande), et le film a payé six mois de travaux. Quand on fait un tel choix, on espère que sa carrière y survivra. On voudrait toujours que les très mauvais films ne soient jamais vus de personne… » (rires)Ce qui s’appelle ajouter l’honnêteté à la lucidité, avec en sus le sens de l’humour…

J.F. PL.

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