Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

FIGURE CULTE DE L’ÉLECTRO BELGE DES ANNÉES 80. AUJOURD’HUI, IL CONTINUE DE CONCOCTER SES PROJETS DANS L’OMBRE, ENTRE 2 MUSIQUES POUR JEU VIDÉO.

Quand on sollicite un entretien par e-mail, la réponse fuse: « Mon portrait? Vous êtes sûr que cela intéresse quelqu’un? Il doit y avoir erreur sur la personne… «  Lederman, homme de l’ombre… Il n’en a pas toujours été ainsi. Pas besoin de creuser longtemps pour trouver les indices d’un trajet atypique.

Première étape: Londres, où Lederman débarque à la fin des années 70. Des boulots comme coursier en moto ( « J’ai risqué ma vie tous les jours », sourit-il), une barre chocolatée comme pain quotidien. Un jour, il passe une audition pour jouer dans Roxy Music. « On m’a dit que Brian Ferry avait besoin de tout, sauf d’un nouveau Brian Eno. «  Il précise: « Ils voulaient juste dire qu’il n’avait pas envie d’un bidouilleur. «  D’autres rencontres cliquent mieux. Comme le jour où il croise Daniel Miller, futur patron du label Mute, à l’étage d’un magasin de badges. « Je me souviens de soirées chez sa mère, à écouter de la musique jusqu’au bout de la nuit, lui sortant une cassette d’un jeune groupe appelé Depeche Mode… «  La connexion permet à Ledermann de jouer aux côtés de Fad Gadget, The The…

Game fever

En 81, il rentre néanmoins au pays, frayant avec la scène électro-new wave bruxelloise. Avec Digital Dance, il a déjà pu jouer à la même affiche que Joy Division au Plan K. Les projets suivants s’appellent Kid Montana, électro pop tongue in cheek, et surtout The Weathermen. En 87, le single Poison cartonne, touchant jusqu’à l’Angleterre et les Etats-Unis. Mais Lederman a du mal à digérer le succès. « Avant, on vous dit de faire ce que vous voulez. Et dès que vous en avez un, tout le monde vous dicte ce que vous avez à faire. » La dépression guette. Lederman prend ses distances. Un peu. Il s’occupe des affaires de Front 242. Au milieu des années 90, il se lance dans la musique de jeux vidéo. « J’adore ça: pouvoir sortir du format pop, écrire une musique qui soit de qualité, tout en restant transparente. Aussi bien pour des scénarios violents que pour des jeux censés démontrer à quel point l’habitat des lions en Afrique est menacé. »

Un jour, il reçoit un coup de fil: Alain Bashung est à Bruxelles pour enregistrer l’album Chatterton. Il cherche quelqu’un qui sache manipuler un sampler. Trois ans plus tard, le chanteur rappelle Jean-Marc Lederman pour lui commander une chanson. Ce sera Ode à la vie sur Fantaisie Militaire. Une véritable aubaine: alors que Ledermann est dans le creux, le disque de Bashung cartonne. « Du coup, j’ai par exemple pu renégocier mes droits de publishing. Cela m’a permis de monter mon propre studio. « 

Aujourd’hui, la révolution numérique a encore un peu simplifié la tâche de Lederman. « J’ai attendu ça toute ma vie. Si vous voulez créer, vous n’avez plus d’excuse. «  Pas pour autant que le bonhomme s’est mué en technophile béat. « Peut-être la musique doit-elle être gratuite. Le fait est que je n’y pense pas quand je travaille dessus. Après, il est peut-être juste dommage qu’on ne lui attribue plus aucune valeur. »

L’an dernier, il a notamment sorti le 1er album de la Femme verte -reprises nocturnes sur lesquelles sont intervenus Burgalat, Vincent Liben…- avant de replonger dans l’électronique pure (le projet Ghost & Writer). Aujourd’hui, il collabore à Kollector, un système de traçage des morceaux en radio, et bosse sur un nouveau disque avec Jacques Duvall. Il s’intitulera Romania et sortira sur le label français baptisé Martyrs of Pop. Forcément…

WWW.JMLEDERMAN.COM

LAURENT HOEBRECHTS

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