Je préfère ne pas

« Autrefois on vous ôtait les amygdales, aujourd’hui les accents. (…) Avant et après Jésus-Christ sont démodés. Tout est avant ou après MeToo. » Si une chose ne se démode pas, c’est bien l’héritage moral du Bartleby de Melville, le célèbre  » I would prefer not to » dont Alain Schifres se revendique: « J’ai rarement goûté à faire les choses avec autant de plaisir qu’à m’en dispenser », soulignait-il dans un dictionnaire amoureux . Seulement voilà: idées reçues, tics de langage et autres poncifs agacent le satiriste. Lequel, après les ruades contre les Ravis de la crèche et la nausée du cool ( Sympa paru en 2016), remet l’ouvrage sur le métier. Embarqué pour un nouveau safari dubitatif parmi les méandres de l’air du temps, le voici remonté, le Schifres! Aversion du téléphone, phobie des importants, portrait de jeunes cadres dans leur jus, on the rocks, de l’art des citations pour désamorcer les fâcheux. Contre ces « couillons d’écrans », face au troupeau des usages (fake news, réseaux sociaux), l’évitiste chasse l’aphorisme et traque le trop plein: « (…) si j’évite d’acheter, c’est surtout de belles choses. Est-il question de se passer de n’importe quoi? » On aurait tort de se priver de l’esprit de fronde jubilatoire, de l’élégance espiègle dont Schifres habille le précis de ses (mauvaises) humeurs.

D’Alain Schifres, éditions Le Dilettante, 128 pages.

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