In blume

Nouvel exemple du bouillonnement jazz anglais, le septet Nérija sort un premier album au charme instantané, moderne et chaleureux.

S’il y a bien un trait qui caractérise la jeune génération jazz actuelle, anglaise en particulier, c’est celui-ci: l’esprit collectif. Comme tout art, le jazz a avancé à coups d’échappées solitaires, d’exploits individuels, de numéros en solo, créant sa propre mythologie de génies singuliers. Aujourd’hui, c’est toutefois une nouvelle dynamique de groupe qui a été enclenchée, redonnant par la même occasion un coup de frais au genre. À l’individu-roi a succédé l’idée de réseau. Non pas celui qui fait gazouiller et mousser une logorrhée toujours plus poisseuse, mais bien celui qui permet de recréer du lien et de la communauté…

Le dernier exemple en date de cet état d’esprit se nomme Nérija. Il vient, forcément, de Londres. En outre, le collectif est signé sur Domino, label surtout connu pour ses passions rock/pop -Arctic Monkeys, Hot Chip, Anna Calvi, etc. Un nouvel indice, non plus de la « hype » passagère qui entoure la scène jazz britannique actuelle (cela fait maintenant plusieurs années que cela dure), mais bien d’une réelle pertinence retrouvée, accrochant un public plus large que celui des spécialistes purs et durs. Même s’il ne faudrait pas se tromper: c’est bien le langage jazz que parle Nérija.

Sept à la maison

Le groupe compte pas moins de sept membres. On y retrouve notamment des têtes connues -comme Nubya Garcia au saxophone ténor. En outre, hormis Rio Kai à la basse, son casting est entièrement féminin: Garcia donc, mais aussi Sheila Maurice-Grey (trompette), Cassie Kinoshi (saxophone alto), Rosie Turton (trombone), Shirley Tetteh (guitare) et Lizy Exell (batterie). Ce n’est pas un hasard si la plupart d’entre elles sont passées par le projet Tomorrow’s Warriors. On parle souvent -à raison!- du rôle qu’a joué quelqu’un comme Gilles Peterson dans l’éclosion de la jeune garde britannique. Mais l’organisation fondée au début des années 90 par le bassiste Gary Crosby et sa partenaire Janine Irons a également contribué au bouillonnement du moment -en mettant l’accent sur la diversité dans les arts à travers le jazz, s’adressant plus particulièrement « au public issu de la diaspora africaine et aux filles ». Avec une idée centrale: la coopération plutôt que la compétition, la solidarité plutôt que les postures narcissiques.

In blume

Nérija met cette éthique en pratique en partageant par exemple les compositions de son premier album -un morceau chacun, et trois autres crédités à l’ensemble du groupe. De la dramaturgie languide de EU (Emotionally Unavailable) aux accointances afro-beat de Swift ou Last Straw en passant par la vibe Blue Note de Unbound, Blume est à la fois fluide et généreux, toujours juste dans ses intentions. Produit par Kwes, plutôt connu pour son CV hip-hop-électro, le disque cherche en permanence à coller au plus près du bouillonnement du live. Un objectif un peu vain, certes, mais qui permet de donner une bonne idée de l’entité et de sa vision de la musique: à la fois élégante et bienveillante, agile et opulente.

Nérija

« Blume »

Distribution Domino.

7

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