Tintin à Hollywood. C’est ainsi qu’on pourrait qualifier les nouvelles aventures sur grand écran du petit reporter à la houppe. Même si Spielberg et Jackson ont puisé dans la matrice hergéenne la matière première de ce Secret de la Licorne, ils n’en ont pas moins plongé le mythe dans un bain de jouvence numérique. Ce n’est plus de la ligne claire, c’est du pointillisme… L’air de rien, cette « entorse » au style sanctifié du génie belge vaut son pesant de khôrs, la monnaie en circulation en Syldavie. Avant que les galopins de 7 à 77 ans puissent goûter à cette adaptation événement -en Belgique du moins, où l’on n’est pas loin de l’hystérie médiatique-, 3 réflexions en guise de tour de chauffe au volumineux dossier que nous consacrons à l’affaire culturelle de l’année. Avec de solides arguments pour le coup comme l’interview croisée du tandem multioscarisé, un détour dans les coulisses du jeu vidéo ou le regard d’un tintinologue émérite sur la trajectoire esthétique du sorcier Hergé. Pour ceux qui seraient allergiques aux pantalons de golf ou aux jurons trempés dans le whisky, rendez-vous en page 19 où Focus reprend le cours « normal » des choses.

Primo, Tintin continue de fasciner. De toute la galaxie des personnages de BD européens, il est le seul à mettre tout le monde d’accord, des critiques d’art pointus aux amateurs du dimanche. Il résiste au temps et aux modes -et même à Nick Rodwell, ajouteraient les mauvaises langues. Le brassage de thèmes universels, le trait limpide, le mode action ont tissé l’étoffe d’une mythologie pure laine. Même si on pouvait lui préférer à l’époque la modernité et l’espièglerie d’un Spirou, force est de reconnaître une forme d’immanence dans l’£uvre du dessinateur bruxellois. Une £uvre qui, comme le vin, bonifie avec l’âge. Aujourd’hui, on pourrait presque y voir un manifeste pop art…

Secundo, Tintin est et reste belge. Guerre des télés pour accrocher à son revers la médaille du red carpet de l’avant-première, concours de superlatifs, déluge de produits dérivés (dont les incontournables biscuits Delacre!), Tintin fait tourner les têtes du plat pays. Mais n’est-ce pas une vue de l’esprit? Avec un réalisateur américain, une équipe technique américaine, des fonds américains et des acteurs qui n’ont jamais vu une caricole de leur vie, ce Tintin 2011 a-t-il encore seulement une paire de chromosomes marolliens dans son patrimoine génétique? Mais bon, on ne va pas cracher sur un quart d’heure de fierté nationale. Le dernier doit remonter à 1986 lors de la campagne des Diables au Mexique…

Et enfin tertio, Tintin ne serait pas Tintin sans l’impayable Capitaine Haddock. Le personnage aux insultes légendaires n’est pas que le faire-valoir de son complice. Il est sa face sombre. Et apporte par la même occasion cette touche d’humanité -faiblesses comprises- qui fait défaut au héros sans peur et sans reproche inventé par Hergé. Haddock est en quelque sorte à Tintin ce que Gollum était à Frodon dans le Seigneur des Anneaux. Ça tombe bien, c’est le même acteur, Andy Serkis, qui endosse ces 2 rôles zéro ego garanti…

PAR LAURENT RAPHAËL

À LIRE ÉGALEMENT: LE DOSSIER SUR L’HÉRITAGE DE HERGÉ ET LES DESSOUS ÉCONOMIQUES DU FILM DANS LE VIF/L’EXPRESS DE CETTE SEMAINE.

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