God save the nineties

© POONEH GHANA

L’Australienne Courtney Barnett dégaine un deuxième album immédiat et électrique pour les fans des années 90 et les gamins cachés de la génération MTV.

« Tell Me How You Really Feel »

Allez. Il faut bien l’avouer. L’album Lotta Sea Lice composé avec son alter ego américain Kurt Vile ressemblait un peu à des vacances. À une récréation sympa où personne ne s’écorche les genoux ou ne se prend le ballon de foot en pleine tronche. Un disque agréable mais relativement insignifiant et dispensable à l’usure (à quelques exceptions près). Catapultée sur le devant de la scène indé en 2015 avec Sometimes I Sit and Think, and Sometimes I Just Sit, la fille de Melbourne est la preuve vivante qu’il y a encore de l’intérêt dans ce monde de rappeurs pour les guitares et les rockeurs. Ce que devrait d’ailleurs confirmer sa deuxième plaque, à en juger par la curiosité pour son single avant-coureur. Il a déjà largement dépassé le demi million de vues sur YouTube.

Se foutre de tout

Tell Me How You Really Feel est un disque moins drôle, plus sombre que son prédécesseur. Un disque des années 90. Celui d’une jeune femme qui avait cinq ans quand Kurt Cobain est mort mais qui a grandi en écoutant Nirvana et les Lemonheads. Pavement, Weezer, Hole, les Breeders… Il y a aussi un peu de tout ça dans le nouveau Courtney. Les soeurs Deal viennent d’ailleurs y pointer le bout de leur nez. Elles avaient demandé à Barnett de chanter sur Howl at the Summit, extrait de leur décevant album de reformation All Nerve. Les frangines lui rendent la pareille sur deux titres de son nouveau disque. Inspiré par l’attaque d’un internaute (« I could eat a bowl of alphabet soup and spit out better words than you,  » lui avait-il asséné), le premier single extrait de l’album, Nameless, Faceless s’en prend aux trolls du Web et chantonne une citation, lue dans un journal, de la romancière et poétesse féministe canadienne Margaret Atwood ( La Servante écarlate). « I want to walk through the park in the dark. Men are scared that women will laugh at them. I want to walk through the park in the dark. Women are scared that men will kill them. I hold my keys between my fingers. »Crippling self doubt and a general lack of confidence dépeint, lui, son état mental pendant l’écriture.

God save the nineties

Dans son attitude nonchalante de slacker, Barnett semble se foutre de tout. Surtout du regard des gens. Comme en atteste sa drôle de tronche en gros plan sur la pochette de son disque. Il ne faudrait pourtant pas se méprendre. Chanson d’ouverture (peut-être bien la meilleure de l’album), Hopefulessness parle de sentir le poids du monde sur ses épaules et charme par sa lenteur répétitive. Et Tell Me How You Really Feel compte quelques poussées vindicatives. Comme le court et teigneux I’m Not Your Mother I’m Not Your Bitch. Fan autoproclamée des soeurs Williams, de Solange Knowles, d’Elliott Smith et de l’auteur pour enfants Roald Dahl, Barnett reste pour l’instant une énigme. Une énigme qui a ce qu’il faut pour parler au grand public.

Courtney Barnett

Distribué par Marathon Artists/Milk! Records/V2.

8

Le 30/05 à l’Ancienne Belgique.

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