Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

LE PRODUCTEUR DISCO-HOUSE NORVÉGIEN SORT UN PREMIER ALBUM JOUISSIF, QUI JOUE DU DÉCALAGE TOUT EN N’OUBLIANT PAS DE FOURNIR MATIÈRE À DANSER. TODD IS LAUGH!

Todd Terje

« It’s Album Time »

DISTRIBUÉ PAR OLSEN RECORDS/PIAS.

8

Pas besoin de se fatiguer, tout est dit dans le titre. Après quelque dix ans à s’agiter sur des formats courts, le producteur norvégien Todd Terje s’est enfin décidé à sortir un premier véritable album. Leçon numéro un: même au moment du téléchargement à l’unité, l’effort longue durée conserve une cote de prestige… Y compris dans un genre comme la dance ou l’électronique, davantage tenté par le plaisir immédiat. Depuis dix ans, Terje Olsen de son vrai nom (le Todd est un hommage au pionnier house, Todd Terry), a enchaîné les remix et les EP. Il s’est également échappé régulièrement vers la pop (un tube pour Robbie Williams, des coups de main à la production pour le dernier Franz Ferdinand, une collaboration avec Panda Bear…). En 2012, le track Inspector Norse (2e titre le plus référencé de l’année dans le top 100 du site spécialisé Resident Advisor) a fait le break. Définitivement, il était temps pour un album…

Cocktail party

De là à dire que Todd Terje commence à se prendre au sérieux, il y a cependant encore un pas. Pas aujourd’hui que le producteur pince-sans-rire va se monter du col. La pochette cocktail party (que l’on dirait signée par l’illustratrice Gaëlle Grisard, en fait réalisée par le fidèle Bendik Kaltenborn), désamorce toute tentative du genre. It’s Album Time = it’s Fun Time, fantaisie et décalage assumé. Le titre Svensk Sas en est le meilleur exemple, ou en tout cas le plus spectaculaire, là où le trait est le plus forcé. Le morceau ressemble à une version accélérée et moustachue d’une salsa de salon, qui aurait pris du gaz hilarant. Précision tout de même: on n’est pas non plus dans la grosse gaudriole. C’est d’ailleurs la seconde leçon du jour: il y a rire et rire, et si Terje manie l’humour, ce n’est pas non plus farandoles et chenilles pouêt pouêt. Certes, le Norvégien n’hésite pas à glisser des citations exotica (Alfonso Muskedunder), des synthés à la Vangelis, et autres clins d’oeil à la musique d’ascenseur. Mais là où la dance s’est souvent pris les pieds dans ses propres blagues, plus drôle que vraiment dansante, Terje n’oublie jamais sa mission première. Strandbar, par exemple, et son riff de piano classic house, est irrésistible dans son genre. Delorean Dynamite roule lui sur un groove disco à la Moroder. Sans briser la drôle d’homogénéité de l’album, Todd Terje se permet également un pas de côté avec une reprise du Johnny & Mary. Le morceau lui donne l’occasion de diminuer le tempo. A la place de Robert Palmer, c’est Bryan Ferry qui vient crooner au ralenti, aussi séducteur que vulnérable. En fin de disque, l’insubmersible Inspector Norse vient boucler la boucle.

Entre house et italo-disco, plans balearic et musiques d’apéro, Terje détourne ainsi les genres sans en enlever la charge festive, jouant sur le second degré sans jamais en sacrifier la musicalité. Chaudement recommandé.

EN CONCERT LE 12/07, AUX ARDENTES, LIÈGE.

LAURENT HOEBRECHTS

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