Écorces Vives

Dans les parages de Cézerat (Cantal), des personnages rompus par la ville -sa rudesse et sa poisse-, débarquent pour fuir quelque chose: pour le capitaine Laurentin, une hiérarchie bête à manger du foin; pour Éli, une promesse de vie familiale brisée net sous la tôle froissée; pour Louise, un prédateur à domicile. Sur place, les locaux végètent entre traditions viriles fusil à l’épaule, éducation aux poings et front plissé face à l’inconnu. Exempt de manichéisme pourtant, le roman d’Alexandre Lenot offre comme alliés à ces âmes brisées -forcément menacées puisque étrangères-, deux braves petit vieux, des frères en rupture de ban avec les stigmates ancestraux de leur milieu, et deux femmes réunies par la mort d’un même villageois, qui tenteront de bâtir sur place une sororité contre vents et marées. À la jonction entre les mouvances éditoriales dites du « noir rural » et des romans consacrés au périurbain, Écorces Vives évite deux écueils: enfermer son lecteur en une gangue bucolique comme sous une cloche à fromage et livrer une sociologie « froide » du petit peuple vu d’en haut. Tout ici est politique, incarné, bagarreur -jusqu’à la langue, qui donne un tour lyrique aux sensations tout en rendant grâce à la placidité régénérante de la Nature pour ceux qui savent l’écouter.

de Alexandre Lenot, ÉDITIONS Actes Sud, 206 pages.

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