Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

APRÈS UNE SÉRIE D’EPS, DANIEL AVERY PASSE LE CAP DU 1ER ALBUM AVEC BRIO: UN IMPERTURBABLE TRIP TECHNO, IRRÉSISTIBLEMENT DANSANT, BIBERONNÉ À L’ESPRIT NINETIES.

Daniel Avery

« Drone Logic »

DISTRIBUÉ PAR PHANTASY SOUND.

8

Devant la possibilité d’un album, la musique techno s’est souvent retrouvée coincée. Que faire? Aligner les tracks calibrés pour les clubs ou proposer un tout à visée plus large, et tenter de donner de l’envergure au propos? Avec Drone Logic, son premier long format, l’Anglais Daniel Avery a l’excellente idée de ne pas trancher. C’est la première qualité du disque. Remplir à la fois le cahier des charges nécessaires pour fricoter en club tout en ne négligeant pas l’importance du format album et des possibilités qui vont avec.

A 27 ans, Daniel Avery a déjà officié pas mal d’années derrière les platines. Né à Bornemouth (côte sud de l’Angleterre), il est notamment passé par la Fabric, club réputé de la capitale, dont il a pris en main l’un des mix officiels. Avery est pourtant arrivé à l’électronique sur le tard. Ses premiers emballements ont été rock. De là peut-être l’attachement au format album. De là aussi le titre du disque qui ramène à ses premières amours pour la musique shoegaze, comme pratiquée par exemple par My Bloody Valentine. Il ne faudrait cependant pas se méprendre: Drone Logic ne s’écrase jamais contre le mur du son. Il n’y a aucune tentation bruitiste ici, juste la succession de longs morceaux (rarement moins de six minutes), montées irrésistiblement acides et classieuses -à l’image de Water Jump, entrée en matière directement dansante.

Sur de bons rails

Il n’y a probablement pas de hasard: Drone Logic fait souvent penser à des groupes comme Underworld ou les Chemical Brothers -dans leurs côtés les plus psychédéliques, les moins « big beat » (le morceau Free Floating). Soit deux formations issues des nineties qui ont elles aussi commencé par traîner du côté du rock. Le track même Drone Logic renvoie par exemple immanquablement au Rez des premiers cités. Cela ne fait pas pour autant de l’album d’Avery un disque « vintage ». C’est l’avantage des musiques électroniques: même en zieutant en arrière (ici donc les années 90, la techno qui croise le rock, Andrew Weatherall, l’acid -voir These Nights Never End, etc.), elles continuent de sonner modernes.

Au-delà, la « Logique du drone » donne surtout une cohérence au tout. Hormis l’interlude apaisé Spring 27, le disque trace sa route, imperturbable. Comme tous les bons albums techno, celui d’Avery réussit ainsi à être insistant sans lasser, musique répétitive qui change pourtant de focale toutes les 30 secondes. Comme un trajet en train, Drone Logic donne l’impression de ne jamais sortir des rails, variant à peine les paysages, tout en emmenant ailleurs. Sur son site, Avery explique: « Tous mes artistes et DJ’s préférés emportent leur public avec eux quand ils jouent; les gens se retrouvent pris dans leur monde pendant quelques heures et ne peuvent pas en sortir si facilement. Vous partez avec eux en voyage. C’était l’idée pour l’album. » Il insiste encore: « La seule chose que je savais, c’était que je voulais que ce disque soit un voyage. » Bienvenue à bord!

LAURENT HOEBRECHTS

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