Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

SA DÉCLINAISON PHYSIQUE EST PRÉVUE POUR LE 17 JUIN MAIS RADIOHEAD VIENT DE SORTIR, DIGITALEMENT, SON PREMIER ALBUM EN CINQ ANS. RETOUR EN GRÂCE.

Radiohead

« A Moon Shaped Pool »

DISTRIBUÉ PAR XL RECORDINGS.

7

Une sortie de disque en 2016, ça se pense et ça s’orchestre. Même, voire peut-être surtout, quand on est un groupe du calibre et de l’intelligence de Radiohead. Après avoir envoyé à ses fans par la poste, le 30 avril, des cartes annonçant son nouveau single Burn the Witch, la bande à Thom Yorke disparaissait le 1er mai des radars. En 2006, lors d’une interview au Culture Show de la BBC, Yorke déclarait vouloir qu’on se souvienne de Radiohead pour How to Disappear Completely. Un extrait de Kid A (à la fois son album le plus beau et le plus audacieux) qu’il prenait quelque part au pied de la lettre le jour de la fête du travail en effaçant tout le contenu de son site Web et de ses profils sur les réseaux sociaux. Twitter et Facebook en tête. Cette courte éclipse à l’allure toute symbolique serait suivie deux jours plus tard d’un clip cinéphile en stop-motion fabriqué par Chris Hopewell rendant hommage à un film culte britannique de Robin Hardy: The Wicker Man. Puis par la vidéo d’un deuxième single (Daydreaming) réalisée celle-là par Paul Thomas Anderson. Juste retour des choses, Jonny Greenwood ayant signé pour le réalisateur californien les bandes originales de There Will Be Blood, The Master et Inherent Vice. Le même jour, Radiohead annonçait la sortie digitale de son nouvel album pour le 8 mai et de son format physique pour le 17 juin. Un come-back savamment mis en scène donc après pratiquement cinq ans de silence. Cinq années durant lesquelles chacun a vaqué à ses propres occupations. Le batteur Phil Selway a sorti un album solo et Thom Yorke fait de même quand il ne jouait pas avec Flea, Nigel Godrich et Joey Waronker sous le nom d’Atoms for Peace.

Produit par Godrich, A Moon Shaped Pool est un disque-somme. La somme de tout ce que Radiohead a pu proposer pendant 20 ans. Collectivement mais aussi à des échelles plus personnelles. Comme le travail de Jonny Greenwood pour le cinéma avec les musiciens classiques du London Contemporary Orchestra (qui signent ici les cordes et les choeurs). Certains titres sur A Moon Shaped Pool figurent depuis longtemps dans le répertoire du groupe d’Oxford. True Love Waits a été interprété pour la première fois le 5 décembre 1995 en Belgique (c’était à La Luna) et avait bénéficié d’une version live sur l’album I Might Be Wrong (2001). Burn the Witch était déjà en cours de fabrication pendant l’enregistrement de Kid A (2000) et Yorke inaugurait Present Tense à l’un de ses concerts solo en 2009. Radiohead a toujours su prendre son temps. De retour au format chanson (elles se suivent par ordre alphabétique) après le jammesque et claustrophobe The King of Limbs, il intègre à merveille les ambiances acoustiques (Desert Island Disk va jusqu’à rappeler Nick Drake), les atmosphères électroniques et les ambitions classiques (le splendide The Numbers) tout au long d’un neuvième disque intense et fascinant à la beauté désolée. Pas son meilleur certes, mais un album panoramique qui renoue avec les vraies mélodies sans abandonner l’exploration.

JULIEN BROQUET

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content