Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

DOCUMENTAIRE DE VASSILI SILOVIC.

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En septembre 2005, 80 % de la ville étaient sous eau. Mille huit cents personnes avaient trouvé la mort. Deux tiers de la population étaient sans abri. Que reste-t-il de La Nouvelle-Orléans dix ans pratiquement jour pour jour après le passage de Katrina? Qu’y est devenu le quotidien? Qu’est-il arrivé à ses habitants? Combien de temps faut-il et comment fait-on pour reconstruire une ville? Peut-on aussi rebâtir une communauté? Telles sont quelques-unes des questions évoquées par cet intéressant documentaire forcément très musical signé Vassili Silovic. « Sans le jazz, les parades, La Nouvelle-Orléans serait comme n’importe quelle ville des Etats-Unis (…) Il a fallu des années pour que la vie revienne et la musique y est pour beaucoup », expliquent ceux y qui sont restés. Ethnologues, attachée de presse de la ville, vice-chef de la police, musiciens ou simples citoyens se racontent et se souviennent. Ils se souviennent de la ville qui sent la mort et des cadavres qui flottent. Des incendies, des pillages et des suicides. Du sentiment d’abandon aussi. Secours arrivés quatre jours après la catastrophe, départ sous la menace des armes et familles séparées lors des évacuations.

Les marques laissées par les services de secours il y a dix ans sont souvent encore visibles sur les maisons. Certains politiciens ont proposé de raser la cité. D’autres d’en faire un nouveau Las Vegas… Rien de tout ça n’est arrivé, mais le visage de La Nouvelle-Orléans a changé à jamais. C’est que la gestion de l’après-Katrina a profondément modifié la démographie de la région. Les plus pauvres, éparpillés dans le pays, n’ont jamais pu regagner leur domicile ou ce qu’il en restait. Et des gens du monde entier se sont mis à y faire du repérage et à y spéculer.

Katrina n’est pas juste une catastrophe naturelle. Lors de la construction des digues, « le corps du génie militaire avait voulu faire des économies sur l’acier, avance une activiste. Katrina est la pire catastrophe d’ingénierie civile de l’histoire des Etats-Unis. »

Bien filmé et solidement documenté, ponctué entre autres par des interviews de Big Freedia qui a dû voler pour survivre (« l’argent n’avait plus de valeur, qui que vous étiez »), Allen Toussaint et Irma Thomas, Only New Orleans n’est toutefois pas un éloge funèbre. Il évoque aussi la reconstruction et la renaissance, l’association Make it Right de Brad Pitt qui a trouvé des solutions architecturales simples et écologiques… A La Nouvelle-Orléans, même du malheur on finit toujours par faire une fête.

JULIEN BROQUET

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