Roman graphique nourri de musique et d’arts plastiques, Ici continue de dépasser allègrement les seules frontières du Neuvième Art. Pour parvenir à l’efficacité et la simplicité apparente de Ici, Richard McGuire a d’abord été puiser aux nombreux arts qu’il connaît et manie depuis bientôt 30 ans. Cette lecture courant sur de grandes doubles pages? « Dans le livre pour enfants, on est habitué à utiliser des images sur une telle surface, ça m’a beaucoup influencé. » Une scénographie basée sur un et un seul axe de caméra, usant du livre dans toutes ses dimensions, le pli de celui-ci correspondant à l’angle de la pièce qui constitue l’essentiel de Ici? « Ça tient de la sculpture, de l’objet architectural. J’ai réalisé un vrai plan de la pièce, une modélisation, je voulais que le rayon de lumière de la toute première scène, qui passe à travers la fenêtre de la pièce, soit vraiment correct. J’ai installé un spot et c’est là que l’angle de la pièce est devenu le pli du livre. Je me suis dit: « Ça y est, j’ai le bouquin! ». »Et comment décrire autrement que par « musique » le sentiment qui se dégage de la lecture de ce roman, petite mélodie mélancolique avec ses crescendos, ses staccatos et ses silences? L’auteur, lui-même musicien, confirme: « Je continuais à chercher, je ne m’en sortais pas, puis j’ai posé toutes mes pages sur le mur, et j’ai dû y trouver quelque chose de musical. J’ai réalisé que je ne devais plus penser Ici comme un livre ou un comics, mais bien comme une partition: c’était moins une question de narration que de rythme. » Logique donc que l’aventure de Ici ne se soit pas arrêtée à sa publication ni aux frontières de son médium: on peut encore par exemple, jusque septembre à Francfort, s’immerger réellement dans les pages de l’album.

Expo et casques virtuels

Fasciné par le travail mené par l’auteur sur les frontières des unités de temps, d’espace et d’action, le Musée des Arts Appliqués de Francfort lui consacre depuis janvier une grande exposition, qui offre une quatrième dimension aux planches de Ici, le visiteur s’immergeant dans ce même espace à la temporalité changeante, et en en devenant même acteur, parcourant Ici de planches en fenêtres. Une expérience qui a évidemment ravi Richard McGuire, qui avait déjà tâté d’autres expérimentations: « Parallèlement à la version numérique « classique », j’ai tenu à ce qu’on développe une version interactive, une sorte de remix qui redistribue les pages et les fenêtres. Pour pousser un peu plus loin encore le récit linéaire habituel. » Enfin, dernière frontière en date qu’il s’apprête à franchir, celle de la réalité virtuelle: « J’ai été contacté par une firme qui produit des casques pour une complète immersion. Ce sont de nouveaux médias passionnants, mais qui cherchent encore quoi faire. Ils utilisent toujours le langage du cinéma, mais c’est une expérience tout à fait différente. On y travaille, c’est long et compliqué, mais je suis très excité. Ici s’y prête bien. Je ne suis pas prêt de sortir de cette pièce! »

L’EXPOSITION TIMESPACE, D’APRÈS ICI DE RICHARD MCGUIRE, EST À VOIR JUSQU’AU 11/09, AU MUSÉE DES ARTS APPLIQUÉS DE FRANCFORT. WWW.MUSEUMANGEWANDTEKUNST.DE

O.V.V.

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