Takeshi Kitano n’est pas le seul cinéaste pratiquant la peinture, le dessin. Mais il est un de ceux qui ont le plus intimement lié les 2 démarches.

Qui pourrait oublier, dans le sublime Hana-Bi de Takeshi Kitano, l’accord inouï qui s’opère entre le récit du film et les ponctuations apportées plein cadre par les peintures? Des £uvres créées par le déroutant Kitano en personne. Ces tableaux colorés, naïfs et floraux, sans ambition de sublime mais émouvants dans leur désarmante simplicité, ne manquent pas de surprendre, venant d’un cinéaste volontiers ironique et filmant la violence avec un redoutable impact. L’ami Takeshi n’est certes pas à une contradiction près. Mais comment ne pas voir, dans Dolls surtout mais aussi dans le merveilleux Sonatine -un des films les plus libres et jubilatoires jamais réalisés- le peintre derrière le cinéaste? Il n’est pas le seul à manier le pinceau entre 2 prises. Gros plan sur quelques réalisateurs (on aurait pu citer aussi Peter Greenaway) sans frontières…

Satyajit Ray

Le grand réalisateur indien de Pather Panchali et du Salon de musique était un dessinateur hors pair, ayant d’ailleurs débuté dans ce métier, signant des affiches publicitaires et illustrant des livres avant de faire son chemin au cinéma. Il continua à peindre et dessiner pour la préparation et les génériques de ses films. Beaucoup pensent qu’un certain Steven Spielberg s’est inspiré de son croquis d’un extraterrestre pour créer le personnage d’ E.T….

Akira Kurosawa

L’influence d’un de ses professeurs au lycée ancra chez le futur auteur des Sept Samouraïs un amour intense pour la peinture. Kurosawa refusa pourtant d’entrer à l’Ecole des Beaux-Arts de Tokyo, préférant s’engager politiquement (à gauche) tout en gagnant sa vie comme illustrateur de livres. Entré dans l’industrie cinématographique, il y fit la formidable carrière que l’on sait, retrouvant des accents de peintre dans ses mises en scène somptueuses ( Kagemusha, Ran) et prenant parfois même la peinture comme point de départ ( Dreams), tout en créant lui-même d’admirables illustrations préparatoires.

David Lynch

Le réalisateur de Mulholland Drive étudia l’art à la Corcoran School de Washington, puis aux Beaux-Arts de Boston. Passionné de peinture expressionniste (les Viennois, surtout), il n’a jamais cessé de peindre tout en devenant le cinéaste génialement dérangeant qu’on connaît. Plusieurs expos ont été consacrées à ses £uvres, peintures mystérieuses et intenses, angoissées et comportant parfois des animaux morts (insectes, oiseaux) intégrés à la matière picturale…

Federico Fellini

Quand il fait le voyage de son Rimini natal à Rome, avant d’avoir 20 ans, le jeune Fellini est engagé comme journaliste et dessinateur caricaturiste par l’hebdomadaire humoristique Marc’Aurelio. Le futur réalisateur de La Dolce Vita, d’ Otto e mezzo et d’ Amarcord n’arrêtera jamais de dessiner et de peindre (à l’aquarelle) pour la préparation de ses films. La série consacrée à Casanova fut entre autres exposée, laissant admirer le trait plein de verve de celui qui noua par ailleurs des relations avec Picasso et Miro.

Terry Gilliam

Avant de passer derrière la caméra et de se révéler cinéaste génial, avec notamment Brazil et Twelve Monkeys, le natif de Minneapolis fut un illustrateur de tout premier plan. D’abord aux Etats-Unis (dans le magazine satirique Fang du créateur de Mad, Harvey Kurtzman), puis en Angleterre où il intégra le groupe d’humoristes des Monty Python. Ses animations foldingues firent fureur à la télévision. Avant de devenir le réalisateur que l’on sait, Gilliam collabora aussi au magazine français Pilote. Les storyboards de ses films rappellent son grand talent de dessinateur.

Texte Louis Danvers

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