Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

L’AUSTRALIENNE COURTNEY BARNETT ÉPATE AVEC UN PREMIER ALBUM AUX MÉLODIES IMPARABLES DOTÉ D’UN SAVOUREUX SENS DE L’HUMOUR.

Courtney Barnett

« Sometimes I Sit and Think and Sometimes I Just Sit »

DISTRIBUÉ PAR V2.

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L’an dernier à même époque, on était tombé littéralement sous le charme de l’Américaine Angel Olsen et d’un deuxième album envoûtant, Burn Your Fire For No Witness, se baladant du folk au rock avec une grâce écorchée. Cette année, c’est de l’autre côté de la carte, à Melbourne, qu’on s’en est allé tomber amoureux. L’objet de cet émoi s’appelle Courtney Barnett, jeune Australienne énervée de 27 ans qui se promène du rock au folk avec dans les veines un peu de ce sang grunge -filiation qui l’a incitée à intituler son label Milk! Records en clin d’oeil à un extrait du In Utero de Nirvana et la fait monter dans les tours quand elle se met à titiller la fée électricité.

Fille d’un graphiste et d’une danseuse de ballet qui l’ont élevée au jazz et au classique, Courtney, enfant, rêvait de Roland Garros, de Wimbledon et de Grand Chelem. Pourtant aujourd’hui, ce sont avec les cordes d’une guitare et non celles d’une raquette que la demoiselle s’apprête à faire carrière.

Depuis un bout de temps déjà, Barnett avait changé d’instrument, jouant de la gratte dans le groupe garage Rapid Transit avant de se faire embaucher au sein d’Immigrant Union par le batteur chevelu des Dandy Warhols Brent DeBoer, parti se la couler douce au milieu des kangourous et des koalas.

Après la carte de visite A Sea of Split Peas, compilation de ses deux premiers EP sortie l’an dernier qui l’avait déjà emmenée jusque sur la scène du Primavera et le plateau de Jimmy Fallon, la jeune femme sert un album au titre aussi interminable que le contenu en est irrésistible.

Piédestal

Enregistré en dix jours à Melbourne au Head Gap Studio durant l’automne dernier, Sometimes I Sit and Think and Sometimes I Just Sit est une plongée dans les vécus éphémères, le quotidien et les pensées d’une songwriter attachante qui n’est pas sans rappeler la simplicité sincère et l’humour caustique de l’anti-folk. L’écriture d’un Jeffrey Lewis, l’esprit d’une Kimya Dawson, le dessin rudimentaire d’un Daniel Johnston. Habitée par l’attitude Do It Yourself et l’amour de l’artisanat qui leur sont chevillés au corps, Courtney, qui a griffonné sa pochette elle-même à la main, excelle autant dans les titres rock que dans les ballades folks. L’autodépréciation. « Put me on a piedestal, I’ll only disappoint you« , chante-t-elle sur l’énervé Pedestrian at Best dans le clip duquel elle incarne un clown dépressif. Et les commentaires à la lucidité cinglante sur l’ennui et les tracas de la vie. Rhume des foins (Dead Fox), amour de piscine (Aqua Profunda) et spleen post-Noël (Boxing Day Blues).

Fan de Lou Reed et de Jeff Tweedy, Barnett confie les hauts et les bas sur un disque impeccable aux allures de journal intime dans un chanté parlé au charme spontané. Certains disent des futilités sur de grandes choses. D’autres chantent de grandes choses sur des banalités. Quand en plus c’est avec autant de panache et pareil sens de la mélodie, il ne reste plus qu’à s’incliner. Sitting time…

JULIEN BROQUET

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