BAZ LUHRMANN SIGNE UNE ADAPTATION LUXURIANTE ET SENSIBLE DU CLASSIQUE DE F. SCOTT FITZGERALD, RESTITUANT L’ESSENCE DE L’oeUVRE, COMME LA MÉLANCOLIE EN ÉMANANT.

The Great Gatsby

DE BAZ LUHRMANN. AVEC LEONARDO DICAPRIO, TOBEY MAGUIRE, CAREY MULLIGAN. 2 H 22. DIST: WARNER.

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Baz Luhrmann raconte volontiers avoir eu l’inspiration de son adaptation de The Great Gatsby, le classique intemporel de F. Scott Fitzgerald, à bord du transsibérien, alors qu’il écoutait la version audio du livre en dégustant un vin australien. L’histoire est belle, et synchrone avec un film cultivant un sens aiguisé du romanesque; fidèle, par ailleurs, à l’oeuvre de l’écrivain américain, tout en s’inscrivant limpidement dans l’univers du cinéaste. On trouve, au coeur de The Great Gatsby, une question lancinante, à savoir qui était vraiment Jay Gatsby (Leonardo DiCaprio), personnalité en vue du New York des années 20, un individu au passé nébuleux dont son voisin et proche, Nick Carraway (Tobey Maguire), nous donne à partager l’existence somptueuse et les interrogations qu’elle ne manque pas de susciter. Soit une construction n’étant pas sans évoquer le Citizen Kane d’Orson Welles, tandis que le récit se fait tourbillon, qui ajoute à la faille intime et aux amours inachevées avec Daisy (Carey Mulligan), le portrait d’une époque, ces twenties dont le rugissement permanent tiendrait du pied de nez adressé à l’abîme -toute similitude avec la période contemporaine n’est évidemment nullement fortuite.

Le cinéma de Baz Luhrmann s’est toujours nourri d’extravagance, et il n’y avait sans doute que le réalisateur australien pour réussir semblable transposition. Lumineux et visionnaire, son film évoque quelque explosion de paillettes qui, une fois retombées, libéreraient des torrents d’amertume. Comme si la fantasmagorie la plus spectaculaire ne pouvait faire écran qu’un temps à la mélancolie venue submerger les protagonistes –« plus c’est grand, plus c’est intime », dira l’une d’elles, en une profession de foi que le cinéaste aurait fort bien pu emprunter à Fitzgerald. Non content d’être magnifique, son Gatsby trouve aussi dans ce scintillement d’images proprement ensorcelant une densité inespérée; c’est là un film foisonnant et pratiquement inépuisable, au point de supporter allègrement une seconde, voire une troisième vision.

Cerise sur le gâteau, et suivant l’excellente habitude de Luhrmann, les compléments de cette édition Blu-ray se révèlent particulièrement soignés. S’y trouvent notamment décryptés le travail sur la musique, faisant la jonction entre ce que Fitzgerald baptisa « L’âge du jazz » et le hip hop, mais encore celui, fascinant, sur les costumes –« le costume est le décor », dixit Baz. Et jusqu’à la narration et la texture même du film, cette « colle poétique combinant les mots de Fitzgerald et les images qu’il tente de décrire », pour laquelle le réalisateur explique s’être inspiré des effets optiques des films des années 20, pour notre plus grand plaisir de spectateurs. Un must.

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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