Heureusement que j’écoute, en permanence, et télépathiquement, la fréquence « Radio Gnome Invisible », la meilleure antenne pirate du monde de la Terre de l’Espace de l’Univers. Sinon, je n’aurais pas appris, vu le silence intersidéral entourant cette nouvelle flippante, que Daevid Allen, alias Dingo Virgin, Captain Capricorn, Christopher Longcock, Mimi Mimolet, the Alien Australian, Zéro the Hero, the Cock Pot Pixie, and others, était définitivement parti (un vendredi 13!!) rejoindre ses acolytes frénétiques, les Octave Doctors, sur la planète Gong, en s’embarquant, sans prévenir, à bord du mirifique vaisseau spatial Flying Teapot. Bon… Faites passer…

On le connaissait, lui, le Magic Brother, depuis pas mal de temps, on avait dégusté son Camembert Électrique, cru faire de la moto, à fond les manettes, sur le Continental Circus et je me souviendrai longtemps d’un concert, dans les années 70, à Jussieu, où le Gong avait abandonné ses odes à la banane lysergique pour ne produire que des décollages et atterrissages d’avions, pendant que, des fenêtres de la Fac, tombaient des centaines de rouleaux de PQ.

Daevid Allen n’était pas le longiligne baba fumé et pété des neurones que l’on a vite rangé sur les étagères molles des allumés irrécupérables. C’était d’abord un Australien (il faut s’en méfier, des kangourous, qu’ils soient The Saints, AC/DC ou Nick Cave), dessinateur et poète, un grand, (on attend les traductions), un guitariste rocker jazzeux (fondateur, avec Kevin Ayers, lui aussi fondu de la viande verte du cerveau) de « Soft Machine » qu’il a vite quitté, effrayé par l’intellect sérieux et grave de ce combo introspectif, et fondant, dès 1973, la cosmogonie « Planet Gong », territoire beaucoup plus en accord avec son paysage mental et ses désirs de musique à géométrie variable. Toujours appuyé par de formidables musiciens bananesques (Didier Malherbe, aka Count Bloomido Bad de Grasse, Steve Hillage, Pierre Moerlin, Tim Blake, alias High Tea Moonweed…) il a, en douceur, sans jamais faire de mal à personne, sans jamais s’attirer ni haine ni mépris, installé ses théières volantes, à forte tendance électronique, dans le paysage musical et complexe des années rock FM, punk, disco et autres… Sans baisser la garde. Tout simplement à « côté ».

Dans ce monde brutalement réaliste et a-poétique, inutile de préciser que les imprécations chaleureuses de ce doux génie vont nous manquer.

UN TEXTE INSPIRÉ PAR LA MORT DE DAEVID ALLEN, GUITARISTE DE SOFT MACHINE.

JEAN-BERNARD POUY

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