Boursoufflés d’effets 3D tapageurs, les jeux vidéo main-stream se sont toujours livrés à une surenchère visuelle. Logique, puisque depuis le Pong, les développeurs essayent sans relâche d’améliorer le réalisme de leurs productions. Nombreux sont les joueurs s’attachant donc à la qualité des textures 3D et à la modélisation des visages plutôt qu’à l’esthétique globale de leur passe-temps. Profitant d’un relâchement des contraintes éditoriales induit par des canaux de ventes dématérialisés sur consoles et PC, une poignée de développeurs indépendants tournent désormais le dos à cette tendance. Cette nouvelle vague indie s’attachant à conter des récits introspectifs à mille lieues des guerres extraterrestres pour ados retourne ainsi vers une 2D en pixels colorés mais aussi en noir et blanc. Le courant des monochromes s’est d’ailleurs fait remarquer lors du dernier Independant Game Festival de San Francisco. Orienté plate-forme/réflexion, Closure se joue ainsi de faux-semblants astucieux en clair obscur pour modifier la perception de la réalité du joueur, à la faveur d’une boule lumineuse que l’on déplace dans le noir. Deuxième titre marquant à avoir été couronné à l’IGF, Limbo dissimule l’horreur de son contexte (un enfant en prise avec un monde gore et cauchemardesque) en déroulant des personnages et des monstres tout en ombres chinoises. Au-delà du rassemblement californien qui dévoilait également le lynchéen (mais encore non abouti) Devils Tuning Fork, une myriade de projets noir et blanc fleurissent en sourdine sur les étals online des consoles et sur le Web. On citera ainsi EchoChrome (le premier) dont les casses-têtes s’inspirent des illusions d’optique architecturales de Maurits Cornelis Escher mais aussi les productions d’Intuition Game. Un studio à qui l’on doit The Great Red Herring Chase, Fig. 8.mais aussi Gray, pamphlet dénonçant la malléabilité de l’opinion publique sur fond de mouvements de foules. De quoi motiver le jeu vidéo classique à s’emparer du noir et blanc. Mad World de Sega rend ainsi un vibrant hommage aux comics ciselés de Franck Miller tandis que Saboteur d’Electronic Arts recolore les zones de Paris sous occupation nazie monochrome. Attention, maturité esthétique en vue! l

M.-H. T.

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