S’INSPIRANT DE FAITS RÉELS -LA LIBÉRATION, PAR LE GIGN, D’UN AVION D’AIR FRANCE DÉTOURNÉ PAR LE GIA-, JULIEN LECLERCQ SIGNE

UN FILM SOUS HAUTE TENSION.

Décembre 1994. Après des heures d’une interminable attente, le GIGN (Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale) met fin à une prise d’otages sanglante, libérant l’Airbus d’Air France aux mains d’un commando du GIA sur la piste de l’aéroport de Marseille-Marignane. Spectaculaire et rondement menée, l’opération est diffusée en direct sur différentes chaînes de télévision. Parmi les téléspectateurs, Julien Leclercq, un ado qui, 15 ans plus tard, décide de tirer un film des événements. Le résultat, c’est L’Assaut, un film d’action sous haute tension à défaut d’être toujours nuancé, inscrit au c£ur de l’action, précisément. Rencontre avec le réalisateur, à l’heure de relâcher la pression -le film est sorti avec succès la veille en France.

Vous aviez 14 ans au moment des faits relatés dans L’Assaut. Quel souvenir en aviez-vous gardé?

Maintenant qu’on est passés par le 11 septembre, on a tendance à se rappeler des événements forts, comme ça, en direct. Mais moi, je me rappelle qu’à 14 ans, cela faisait une dizaine d’heures qu’on filmait cet avion à Marignane, où il ne se passait rien. On ne se doutait pas du tout qu’il y avait 30 mecs du GIGN en train de se préparer et de s’équiper dans des hangars, à l’abri des regards. Et tout d’un coup, il y a la surprise de voir ces 3 passerelles qui rentrent dans le champ de la caméra, et l’incompréhension. C’est tellement spectaculaire, on sent que c’est la libération, mais sans comprendre. C’est cela qui m’intéressait dans l’idée de faire ce film, et j’ai commencé à rencontrer les acteurs de l’événement qui m’ont raconté leur action du point de vue intime.

Comment avez-vous procédé pour traduire l’adrénaline à l’écran?

Je voulais faire un film de guerre intimiste et sensoriel. Je ne voulais pas utiliser de plans larges, mais rester très proche des personnages, parce qu’ils me racontaient tous le chaos: ces sensations de ralenti, le champ de vision qui se rétrécit sur la cible, et le bruit. Les mêmes mots revenaient, le bruit des balles sifflantes, ce qu’on a essayé de retranscrire au montage son. Tout le monde attend l’assaut, c’est le climax, et moi, je voulais le retranscrire du point de vue humain. Je me suis par exemple interdit de mettre la caméra en dehors des passerelles, de filmer les passerelles sur le tarmac, à part au début. Ensuite, la caméra est toujours sur la passerelle, avec les balles qui fusent: c’est l’antithèse des images de TF1 que tout le monde a vues.

Pourquoi avoir opté pour une stylisation de l’image, avec une désaturation des couleurs?

Contrairement à ce qu’on pourrait croire, je n’y ai que très peu recouru. Je ne suis pas fan de la couleur dans mes films, et ça allait avec l’environnement graphique du plateau. L’action se passe en décembre, on est en plein c£ur de l’hiver, tarmac gris, hangar gris, avion blanc, combinaisons GIGN bleu marine qui tirent vers le noir -la seule couleur que je voulais voir revenir à la fin, c’est la couleur du sang dans les blessures, que ce soit côté terroriste ou GIGN.

Avez-vous été inspiré par d’autres films?

Oui, bien sûr: le travail de Paul Greengrass, que ce soit sur Bloody Sunday ou sur United 93, ou même après, quand il a fait la trilogie des Bourne. Comme on allait relater un événement réel, j’ai voulu adopter ce style documentaire, caméra à l’épaule, qui est sublimé dans le débarquement de Saving Private Ryan, où on s’interdit de poser classiquement pour poser, où on est au c£ur du chaos. Et j’ai adapté des gros zoom sur la caméra pour aller chercher des choses.

Le cinéma français s’est longtemps défié de ce genre de films. Vous voyez une explication à l’évolution en cours?

Il y a une nouvelle génération de scénaristes, de producteurs et de réalisateurs qui arrivent. Je fais avant tout des films que j’ai envie de voir en tant que spectateur. Un film, cela prend 2, 3 ou 4 ans de sa vie, tous les jours, il faut plutôt croire en sa religion, vis-à-vis de ça. Avec sa grosse qualité d’écriture et de fabrication, le diptyque de Jean-François Richet sur Mesrine a ouvert la possibilité d’aller rechercher des événements comme celui-là, ou des personnages qui font partie de l’Histoire, sans remonter à Bonaparte. Roschdy Zem a tourné un film sur l’affaire Omar Raddad, on en annonce un sur l’affaire d’Outreau, je trouve cela positif si cela permet d’amener des événements réels dans les salles de cinéma.

RENCONTRE JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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