Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

RACONTEURS D’HISTOIRE – THIERRY ROBIN ENTERRE STALINE PENDANT QUE MATHIEU SAPIN SUIT L’ASCENSION DE FRANÇOIS HOLLANDE. DEUX MANIÈRES DE RACONTER L’HISTOIRE, MAIS TOUJOURS EN BD.

1 DE FABIEN NURY ET THIERRY ROBIN, ÉDITIONS DARGAUD.

2 DE MATHIEU SAPIN, ÉDITIONS DARGAUD.

« Ce qui compte, c’est une bonne histoire, qu’elle soit réelle ou de fiction. On peut rarement vanter son travail, mais ici je peux le dire: cette histoire est excellente! » L’histoire en question, sur laquelle Thierry Robin a travaillé trois ans et dessiné 120 pages, est effectivement excellente, au sens dramaturgique du moins: quel scénariste aurait pu imaginer un personnage comme Staline et une dictature aussi absurde et violente que l’Union Soviétique en 1953? Même Van Hamme ou Cauvin n’auraient jamais osé! C’est dire si la bande dessinée trouve aujourd’hui dans l’Histoire de quoi raconter des histoires.  » Le genre peut traiter n’importe quel sujet, de n’importe quelle façon, confirme Thierry Robin. Le champ d’expérimentation en bande dessinée reste incroyablement vaste, peut-être plus qu’au cinéma.  »

Fiction basée sur le réel…

Pour raconter en une dilogie (ne dites pas diptyque) les quelques jours entourant la mort et l’agonie de Staline -avant dans le tome 1, juste après dans le tome 2-, Thierry Robin et son scénariste Fabien Nury ont fait le choix de la fiction basée sur des faits réels.  » Il s’agit d’une époque très précise, avec des personnages très précis, et tous les faits qui y sont relatés ont eu lieu. Mais Fabien a fait des choix, c’est là que la fiction entre en jeu. Nous avons écarté certains protagonistes, avons imaginé des dialogues… Dans un but, surtout, de clarté: sélectionner les éléments qui vont donner tout le jus, toute l’aberration du système soviétique. Ce n’est pas surpeuplé d’infos, mais tous les éléments sont présents pour comprendre l’époque. Et le ton, celui d’une comédie noire très acide, renforce le drame et le côté grotesque des événements et des acteurs. » Des libertés donc, sans être moins crédible pour autant: le premier tome reçut le prix de la meilleure BD historique. Belle reconnaissance pour un dessinateur qui se frottait pour la première fois au réel, sur un sujet qu’il connaissait ceci dit déjà par c£ur.  » Il y a six ans, j’ai commencé une « vraie » bio de Staline en BD, très documentée. Mais après 35 planches, j’avais raconté six mois de 1918… Je voulais tout mettre, je serais mort avant d’arriver à 1932! J’ai laissé tomber, puis j’ai reçu le scénario de Fabien: c’était épatant, il réussissait à faire tout ce que je n’avais pas pu faire. »

… ou BD reportage

Mathieu Sapin, lui, a choisi la démarche exactement inverse pour raconter la Campagne présidentielle de François Hollande: un BD reportage qui se veut quasiment exhaustif sur ce que furent 200 jours de campagne, à courir derrière un candidat qui allait devenir Président, sans la moindre fiction. Pour au final, un album de BD très indigeste, et parfois illisible. Un tel carnet de campagne dessiné convenait parfaitement à une publication périodique comme ce fut le cas dans Libération, il s’avère moins amène une fois réuni en album. La preuve que la BD du réel a de l’avenir, sans être pour autant devenue la panacée. l

OLIVIER VAN VAERENBERGH

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