Trump, migrants, environnement… La science-fiction à la rescousse

La Guerre des Mondes de Steven Spielberg, un symbole du cinéma de science-fiction © Paramount Pictures
Lola Contessi Stagiaire

Face à une actualité qui frise parfois la fiction, des romans fantastiques, apocalyptiques et pseudo-historiques refont surface.

Le NY Times et Le Monde relayaient récemment l’emballement des réseaux sociaux quant aux « faits alternatifs » proférés par le porte-parole de Donald Trump et défendus par sa conseillère au lendemain de sa cérémonie d’investiture. Des internautes avaient trouvés dans ces vérités déformées une résonnance étrange avec un livre de science-fiction écrit par George Orwell il y a 70 ans déjà. Les deux journaux remarquaient que les ventes de 1984 avaient brusquement augmentées à la suite de cette polémique. D’autres romans de science-fiction sont également concernés par ce pic de ventes.

Il y a quelques jours, le directeur de la Berlinale déclarait aux journalistes que le festival représenterait « le quotidien apocalyptique« . Les films hors compétition s’y emploient. Le festival propose dans son Panorama de nombreux films revenant sur des épisodes tragiques de l’histoire dans un devoir de mémoire. Certains abordent également ce que Wieland Speck nomme les para-réalités du monde contemporain. Anarchie, Etat islamique, censure médiatique et racisme américain sont au coeur du programme. Chose étonnante, la science-fiction est aussi mise à l’honneur. La Rétrospective de la Berlinale propose des histoires de sociétés futuristes totalitaires, de mondes apocalyptiques et de rencontres extra-terrestres. Et surprise, parmi ces films, l’adaptation du livre 1984.

Uchronies et dytopies sont donc à la mode. Pas de craintes, ce ne sont pas les nouvelles maladies pandémiques. Derrière ces termes mystérieux se cachent les romans qui décrivent un futur apocalyptique ou réécrivent l’histoire. Parce que la science-fiction pioche souvent dans le présent ses sources d’inspiration et qu’elle permet de mettre à distance des questions contemporaines en les situant dans un autre espace-temps, il est temps de dépoussiérer les meilleures oeuvres du genre.

10 livres effrayants ou édifiants dans lesquels se plonger pour se rassurer sur l’état du monde ou pour y entrevoir un avenir sombre pas si improbable.

1984, bestseller 70 ans après sa 1e publication
1984, bestseller 70 ans après sa 1e publication © Justin Sullivan

1. 1984, George Orwell

« Big Brother is watching you. » Dans un futur imaginaire, le monde a été divisés en 3 blocs après d’intenses guerres nucléaires. L’Eurasia y est gouvernée par un dirigeant totalitaire. Il contrôle les médias, invente de nouvelles technologies intrusives, construit sa propre vérité et veut surveiller jusqu’aux pensées de ses citoyens. Si les internautes se sont récemment arrêtés sur les « faits alternatifs » de ce gouvernement autoritaire, la thématique des technologies de surveillance fait également écho à l’actualité.

2. La Servante écarlate, Margaret Atwood

June est une servante écarlate. Dans ce futur dystopique où la religion exerce un pouvoir absolu, les femmes appartiennent à 3 catégories. Celle de l’héroïne a pour fonction d’assurer la reproduction humaine. Les Epouses règnent quant à elles sur la maison, tandis que les Marthas s’occupent du ménage. Celles qui n’entrent pas dans ce système sont envoyées à la mort. Elles manipulent des déchets toxiques dans les Colonies. L’héroïne se perd dans ses souvenirs, seule échappatoire à sa vie misérable. Pas besoin de dire combien la dimension féministe et la question du pouvoir religieux sont d’actualité.

3. Ravage, René Barjavel

Et soudain, plus d’électricité. La machinerie technologique qui gouvernait le monde cesse de fonctionner. Alors que le chaos s’installe, quelques citadins décident de marcher vers les campagnes. La transition vers la vie paysanne sera cependant difficile pour ces hommes qui n’ont connu que le règne de la science. A travers ce monde post-apocalyptique, Barjavel aborde la dépendance à la technologie et la question environnementale, deux enjeux résolument contemporains.

4. Farenheit 451, Ray Bradbury

Dans une société future soumise à la dictature, Montag est chargé de brûler les livres interdits. Il cède pourtant à la tentation. En lisant un livre, il devient criminel. Plus encore, comment peut-il poursuivre son oeuvre destructrice maintenant qu’il a gouté aux plaisirs de la lecture? Un livre archi-connu que l’on relit pour se rappeler l’importance de l’imaginaire, de la littérature et de la presse, face à la censure.

5. Impossible ici, Sinclair Lewis

En période de crise économique, un leader charismatique tente de se faisant le défenseur des véritables valeurs américaines. Une fois arrivé au pouvoir, Berzelius Windrip se tranforme pourtant en dictateur, excluant ses opposants politiques et mettant en place une milice personnelle. Alors que la dictature pointe son nez, les citoyens américains continuent de le soutenir. Une dystopie mise en parallèle par beaucoup avec l’élection de Donald Trump et les premiers débats autour de son mandat.

6. Le Complot contre l’Amérique, Philip Ross

L’uchronie décrite par Philip Ross semble incroyablement réaliste et c’est ce qui la rend terrifiante. Dans les Etats-Unis des années 40, un enfant assiste à la prise de pouvoir d’un sympathisant nazi, Charles Lindbergh. En des termes étrangement familiers, il incite la population juive à s’intégrer. Insidieusement, la discrimination et l’antisémitisme s’installent. Dans la communauté juive, les réactions divergent. Un roman qui réecrit l’histoire pour ouvrir à la réflexion.

7. Le Monde selon Gabriel, Andréi Makine

La science-fiction ne s’arrête pas aux romans, elle envahit le théâtre. La pièce de Makine décrit un monde où la parole est bannie. Un média unique est proposé aux milliers de spectateurs. Réduits à de simples consommateurs d’images, les citoyens sont incapables de réfléchir. Face à cette dictature, il reste pourtant un espoir : la parole poétique. Hymne au langage, au théâtre et à la révolte ce texte se lit comme un conte. Le contrôle des médias et la critique d’un divertissement sans conscience paraissent on ne peut plus actuels.

8. Marche ou crève, Stephen King

Dans une Amérique soumise à un pouvoir dictatorial, des jeux télévisés particulièrement cruels sont organisés. Des adolescents y participent à une traversée du pays. Durant cette Longue Marche, un arrêt prolongé est sanctionné par la mort. Une victoire signifie gloire et richesse, mais elle est également synonyme de survie. Ce roman d’anticipation est un Hunger Games avant l’heure et questionne les limites du divertissement.

9. Le Meilleur des mondes, Aldous Huxley

Dans le meilleur des mondes, les hommes sont clonés. Plus de question sociale sur le marché du travail : les aptitudes de chacun sont conçues en fonction de la caste à laquelle il appartient. La consommation et le divertissement font office de loi. A l’écart de ces villes parfaites, les « sauvages » sont maintenus dans des réserves. Appartenant à la plus haute des castes, Bernard ne se sent pas à sa place, il s’interroge et tente de comprendre ces exclus. La société de consommation, le conformisme, la drogue et l’exclusion, autant de débats apparus dans les années 60. Aldous Huxley, le plus New Age des écrivains de sci-fi, s’est également d’ailleurs intéressé aux drogues et à leurs effets dans « Les portes de la perception. »

10. Watchmen, Alan Moore, Dave Gibbons et John Higgins

Watchmen est un des nombreux comic books qui investissent le domaine de la science-fiction. Dans un univers parallèle, le Dr. Manhattan a permis aux Etats-Unis de gagner la guerre du Vietnam, de garantir la place de Nixon au pouvoir et de se passer du pétrole. La troisième guerre mondiale est sur le point d’éclater et les super-héros, ayant cessé leurs activités, disparaissent progressivement. Une image fantastique de la dictature incarnée dans un personnage aux pouvoirs surhumains.

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