Critique | Livres

La BD de la semaine: Texas Cowboys 2, de Trondheim et Bonhomme

Texas Cowboys 2 © Trondheim et Bonhomme/Dupuis
Laurent Raphaël
Laurent Raphaël Rédacteur en chef Focus

WESTERN | Deuxième volet des aventures de Harvey Drinkwater dans la poudrière de Fort Worth. Un western qui revisite avec malice les codes du genre.

Si on est loin du raz de marée, option spaghetti ou crépusculaire, des années 60 et 70, le western n’en revient pas moins au galop après une longue période de quarantaine pour cause de ringardisation aggravée. C’est vrai au cinéma où Tarantino, les Coen ou Tommy Lee Jones ont remis le genre en selle. C’est vrai aussi en BD où les Christophe Blain (Gus) et autres Boucq-Jodorowsky (la série Bouncer) ont dégainé quelques albums sentant bon la poussière et les règlements de compte.

La BD de la semaine: Texas Cowboys 2, de Trondheim et Bonhomme

Il y a deux ans, le multi-instrumentiste Trond-heim (il a tâté de l’autobiographie comme de l’heroic fantasy) cédait lui aussi à l’appel du Far West. Avec la complicité de Bonhomme au dessin, il signait un western plus vrai que nature convoquant les codes du genre et une belle brochette de fripouilles, tous reliés à Fort Worth, bled perdu du Texas où la vie ne tient qu’à un fil. C’est là qu’atterrissait un jeune journaliste de Boston, Harvey Drinkwater (le buveur d’eau…), censé réaliser un reportage saignant sur ce repère de culs-terreux sans foi ni loi. Pas pressé de satisfaire à la demande de son patron, le pied-tendre comptait surtout sur l’occasion pour donner un coup d’accélérateur à son existence morne. Il allait être servi en s’acoquinant avec Sam Bass, bandit dont la tête était mise à prix. Soucieux du détail, Trond-heim découpait chaque chapitre comme s’il s’agissait d’une publication authentique de l’époque. Le résultat était jouissif. Zigzaguant avec bonheur entre les archétypes, le fleuve narratif principal -les aventures de Harvey donc- se nourrissait de ses nombreux affluents secondaires.

Fight club

Deux ans plus tard, le duo récidive avec un tome 2 qui n’est sans doute pas le dernier. La recette n’a pas vraiment varié. Ni sur la forme avec le même principe de compilation de chapitres courts centrés sur un personnage et la même patte graphique aux couleurs automnales de Bonhomme; ni sur le fond, ce nouvel opus marchant dans les pas du premier. Harvey, qui était rentré à Boston, se voit contraint de retourner afin d’aider son ami Ivy, qui sert d’appât à la bande de Sam Bass pour attirer le journaleux avec l’idée de lui faire payer sa trahison. Six années se sont écoulées depuis son départ mais rien n’a changé dans la ville des vaches. Le marshal rackette toujours le tenancier du saloon, la belle Betsy Marone plume toujours les pigeons de passage au poker, quand elle ne les liquide pas parce qu’ils lui rappellent un peu trop ses violeurs. De nouvelles racailles entrent en scène, comme Bat Materson, organisateur de combats de boxe. Entre les attaques de diligence, les escroqueries et les vieilles rancoeurs, le sang coule toujours à flot même si Trondheim éclaircit un peu la palette. Une petite touche de romantisme perle ainsi avec l’histoire parallèle de Sophia, fille simple qui rêve de se marier à un cowboy. Mais ce sont surtout les figures du soldat amputé d’un bras et de Butch la Framboise qui font le sel de ce deuxième épisode. Le premier, pilier de comptoir, raconte à qui veut l’entendre, et contre un verre de whisky, sa tragique histoire, livrant à chaque fois une nouvelle version.

Quant à Butch, gros nounours bagarreur, il incarne une sorte d’innocence précieuse malgré son air benêt, parce que sincère dans ses intentions, même belliqueuses. Harvey en fera un allié de poids pour se sortir une fois de plus de ce nid de vipères.

  • DE TRONDHEIM ET BONHOMME, ÉDITIONS DUPUIS, 152 PAGES.

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