SpaceBoy, la tête dans les nuages: « Je n’aime pas les films pour enfants qui les prennent pour des cons »

Olivier Pairoux (ici en tournage avec Basile Grunberger): "Je me suis demandé quels films je pourrais bien aller voir avec mes fils aujourd'hui, comment partager avec eux ce que moi j'avais connu dans mon enfance."

Avec SpaceBoy, Olivier Pairoux signe un objet rare: un film d’aventure 100% belge délicieusement nostalgique, à déguster en famille! Entretien.

« Je n’ai qu’une hâte, c’est que le film rencontre enfin son public. Voir une salle pleine de familles, écouter les retours des enfants. Ce sont les meilleurs critiques, je crois! » Olivier Pairoux trépigne. Il a tourné SpaceBoy il y a plus de deux ans, le film est prêt depuis un an, a commencé à tourner dans les festivals cet hiver, et débarque enfin sur les écrans belges, pile pour les vacances d’automne. Il trépigne d’autant plus qu’il s’agit de son premier long métrage, réalisé à 40 ans passés. Un parcours atypique, marqué par une belle carrière à la télé avant de se tourner vers le cinéma.

« J’ai toujours su que je voulais faire du cinéma, dit-il. Quand j’étais ado, je louais DVD sur DVD, des films d’horreur, des films fantastiques. Et puis mon père nous a abonnés à Canal+, et là, j’ai découvert Woody Allen, David Lynch, Lars Von Trier. Une vraie révélation. » Après avoir étudié à l’IAD, Olivier Pairoux veut engranger de l’expérience avant de concrétiser son rêve. Il travaille à la RTBF, puis chez RTL, où il participe à la création de Plug avec son complice Eusebio Larrea, que l’on retrouve au scénario de Spaceboy (lire aussi notre critique du film. Ils partagent un grand enthousiasme et une envie d’essayer des choses nouvelles, d’avancer « sans trop se prendre la tête« .

SpaceBoy, la tête dans les nuages:

Mais d’où vient cette histoire d’un jeune garçon dont le père est astronaute, et qui rêve de conquête spatiale? « Je me souviens qu’un soir, je regardais Tracks sur Arte. Je vois un clip de Boards of Canada, qui utilise des images de Joseph Kittinger (l’auteur en 1960 du plus haut saut en parachute depuis la nacelle d’un ballon à 31.300 mètres apparaît dans le clip Dayvan Cowboy, NDLR), et je tombe complètement amoureux de cette histoire. » Le cinéaste commence alors à imaginer le parcours d’un petit garçon, Jim, qui voudrait réitérer l’exploit de Kittinger. Une histoire d’abord un peu sombre, hantée par la mort et l’échec. Mais parallèlement à l’écriture, Olivier Pairoux devient père. Ses envies de cinéma prennent alors une autre tournure… « À ce moment-là, je travaillais énormément, j’écrivais à côté, et j’avais l’impression parfois de ne pas être assez présent pour mes enfants. Je me demandais comment trouver l’équilibre entre le fait de vouloir poursuivre son rêve et d’assumer ses responsabilités personnelles, notamment familiales. C’est devenu en partie la thématique du film. Jusqu’où doit-on poursuivre ses rêves? À quel moment faut-il dire stop? » Effectivement, le père de Jim doit prendre une cruelle décision: abandonner son rêve d’espace pour s’occuper de son fils, au risque de le décevoir.

Encore fallait-il trouver le ton pour raconter cette histoire au plus grand nombre, l’adresser à différentes générations. « Je me suis demandé quels films je pourrais bien aller voir avec mes fils aujourd’hui, comment partager avec eux ce que moi j’avais connu dans mon enfance, retrouver les sensations du cinéma qui m’avait construit. » SpaceBoy commence d’ailleurs comme un conte des temps modernes, une histoire dans l’histoire, qui nous replonge avec une délectation certaine dans les années 80.

SpaceBoy, la tête dans les nuages:

80’s forever

« J’aime bien l’idée d’aller chercher des références un peu partout, d’avoir une approche décomplexée de la réalisation, nourrie de mes passions et de mes enthousiasmes de spectateur. J’ai l’impression que dans les années 80, il y avait pléthore de films que l’on pouvait partager en famille, Les Goonies, Indiana Jones, Retour vers le futur , où l’on pouvait prendre le même plaisir en tant que parent qu’en tant qu’enfant, et qui, malgré des récits parfois tragiques, comme Stand by Me par exemple, savaient injecter des touches d’humour salvatrices, ce que l’on retrouve dans une série comme Stranger Things. Aujourd’hui, mes enfants ont six et dix ans, et je me demande quoi regarder avec eux. Évidemment il y a des films d’animation incroyables, on est de grands fans de Pixar, il y a les Ben Stassen, mais en live action ? »

Et c’est vrai qu’au contraire du cinéma flamand (on a pu voir récemment des films familiaux assez réussis comme Binti de Frederike Migom, ou Mon père est une saucisse d’Anouk Fortunier), le cinéma belge francophone s’est révélé assez avare en films familiaux jusqu’ici, des films qui prendraient les enfants et les pré-ados au sérieux, en les divertissant tout en les questionnant. « Je n’aime pas les films pour enfants qui donnent l’impression de les prendre pour des cons. J’aime quand on leur donne du grain à moudre, quand ils doivent faire un petit effort pour comprendre. Dans le film, je voulais que les enfants enseignent des choses à leurs parents. Moi je ne sais pas ce que j’apporte à mes gosses, ils le diront dans quinze ans en psychanalyse! La seule chose que je peux honnêtement mesurer, c’est ce qu’eux m’apportent, la pertinence des remises en question qu’ils peuvent amener. » Espérons que SpaceBoy, film d’aventure 100% belge et familial, soit le premier d’une longue lignée.

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