Mon mois à moi aussi: le journal culturel de ces dernières semaines…

Bertrand Burgalat © ISOPIX/Swan Gallet/WWD/REX/Shutterstock
Serge Coosemans
Serge Coosemans Chroniqueur

Dans Rock & Folk, Bertrand Burgalat publie chaque mois son « Mois à moi ». Chez Focus Vif, ce Crash Test S06E02 se la joue dès lors « Mon mois à moi aussi ». Au menu: cinéma sur canapé, littérature d’il y a 45 ans, disques hors-promo et Internet en général…

Chaque mois dans le magazine Rock & Folk, Bertrand Burgalat publie une chronique titrée « Peu de gens le savent: Mon mois à moi« . Comme toujours avec ce génie tranquille de la musique française, c’est à la fois élégant et langue de pute, branché et hors-modes, un peu réac et malgré tout sur la balle. Monsieur Bertrand y partage des découvertes musicales, des emballements littéraires, des souvenirs marrants ou plus émouvants, ainsi que quelques piques bien senties. Je n’achète plus Rock & Folk depuis des années mais je ne rate jamais un « Mon mois à moi« , vu que Bertrand Burgalat scanne à chaque coup sa chronique pour la publier sur son compte Instagram. Ce qui en fait une lecture de contrebande qui se mérite vu que, déjà, sans doute illégale (les droits de reproduction, tout ça…), et puis, surtout, acrobatique, puisque pour pouvoir correctement la lire, il faut en agrandir le texte avec ses gros doigts sur son petit écran de smartphone. Ce qui n’est pas évident… Mais bon pour l’arthrite! Vous l’aurez compris, cette chronique est une forme d’hommage à « Mon mois à moi« : un journal culturel, en vrac, de ces dernières semaines.

1.0VINGT-NEUVIÈME CHRONIQUE

En dernière page du Rock & Folk de septembre, en kiosques aujourd’hui : Nicolas Paugam, Dick Annegarn, le jeu des 7 erreurs entre Mouv’ et Skyrock, l’infantilisation par le design, François Sureau, Boris Maurussane, Hugo Chastanet, La Féline, Dizonord, Jeffers Waldo, Johnny Hallyday, Mick Jones, Jacques Revaux, NRJ l’arroseur arrosé et la véritable histoire des quotas radio.

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J’ai vu ce film assez étrange, Le Rocher d’Acapulco (Laurent Tuel, 1996). Résumé sur Wikipédia: « Sandrine, une jeune provinciale « montée » à Paris pour devenir chanteuse, rencontre Gérald qui, dans une relation perverse pour assouvir ses fantasmes, l’amène à la prostitution. » Plutôt cool, à la fois glauque et assez drôle. Droit au but aussi: en une heure, c’est plié, cette affaire… Ça m’a plu, ça m’a étonné, et je me suis dès lors demandé si ce genre de film était encore possible aujourd’hui, alors que des directives commencent à se mettre en place un peu partout dans le monde occidental pour que l’obtention de subsides et d’aides à la production soient conditionnées par le respect de diverses clauses flirtant avec la nouvelle « bonne morale ». Dans le futur proche du cinéma, y compris d’auteur, sera-t-il dès lors encore possible de naviguer en eaux troubles? De se montrer ambigu? De pouvoir présenter une jeune provinciale montée à Paris embarquée dans une relation perverse autrement que dans une position de victime? Victime des hommes et de la société… Mais… quid d’explorer ses propres zones d’ombres? Son plaisir à se prostituer? Son appât du gain facile sans qu’il ne soit condamné? L’absence de rédemption? Quid de l’imagination tordue et provocatrice d’un héritier de Sam Peckinpah ou d’un adepte du cinéma à l’estomac d’un Gaspar Noé? Alors, voilà ce que je pense: on va continuer à dévaler cette pente savonnée à la moraline (si, si…) sur les 10, 15 ou 20 prochaines années. Puis, forcément, il y aura un gros retour de balançoire, comme après le Code Hays aux États-Unis. La révolution culturelle de 2030, 2035 ou 2040 sera forcément trash, provoc et percutante; après toutes ces années bien bobonnes de cinéma aux scénarios semblant tout droit sortis d’un tract du CDH des années 90 (ou du programme Ecolo d’aujourd’hui).

Sur Netflix, il y a The Social Dilemna (Jeff Orlowski, 2020), un documentaire assez mal foutu sur un sujet pourtant passionnant: l’impact des réseaux sociaux sur nos vies mais aussi sur notre perception même de la réalité. On y parle « capitalisme de surveillance », rushs de dopamine induits par votre fil Twitter ou Instagram, augmentation du suicide et de l’absence de sexualité chez les jeunes et aussi, selon Jaron Lanier, pionnier de la réalité virtuelle, de la possibilité que si les réseaux sociaux ne sont pas régulés d’ici vingt ans, leurs effets pervers entraîneront tout simplement la fin de la civilisation. Je mentirais en disant que cela m’a captivé. Durant les 94 minutes que dure ce film, j’ai checké mon téléphone au moins trois fois, sans le moindre remords. Que les réseaux sociaux soient toxiques, c’est je pense indiscutable, mais comme avec tout ce qui est à la fois attrayant et toxique, il ne faut pas non plus négliger dans l’équation les prédispositions personnelles des unes et des autres. Certaines personnes deviendront dépendantes, cela en rendra d’autres malades. C’est aussi un bon écrin à différentes formes de folies, plus ou moins douces. Mais il existe aussi très certainement l’équivalent aux réseaux sociaux de ce qu’Iggy Pop et Keith Richards sont à la défonce. Des gens qui domptent, ou du moins font mine de dompter, cette toxicité. Des dresseurs de dragons. Ainsi que des types et des meufs qui utilisent ces réseaux comme d’autres fument un joint par semaine, dans leur bain, le samedi après-midi. Des gens qui tirent donc plus de bénéfices que de souffrances de ces choses qui en rendent d’autres malheureux et dépendants. Ce qui implique en fait beaucoup plus de monde que les cas misérables. Alors, je suis bien conscient que je me suis probablement fabriqué là une excuse plaquée or, doublée d’une légende bien branlante. N’en demeure pas moins que chaque personne que je connais s’étant un jour plaint de l’extrême toxicité des réseaux sociaux n’y connaissait pas grand-chose, en rejetait moralement le concept ou… En avait tout simplement une utilisation hautement problématique… Et que de Victor Frankenstein dans ce film, techniciens de la Silicon Valley se désespérant d’une utopie voulue au départ bienveillante ayant en fait abouti à Donald Trump, aux populistes européens et à la propagation de la théorie de la Terre Plate… Mais qui avouent malgré tout avoir des années durant checké leurs phones à tout bout de champ. Alors que moi, depuis bien 10 ans, je le consulte surtout aux cabinets à la place de Voici, que je n’ai plus jamais racheté! Voilà.

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Je suis aussi en train de lire la trilogie Dancers at the End of Time de Michael Moorcock. C’est kitsch, c’est glam. Ça parle de fin de l’univers et de voyages dans le temps, d’immortalité et d’extraterrestres. C’est souvent plus proche des Monty Python que de cette science-fiction pesante aux mâchoires crispées à la Tenet de Nolan et à la Dune de Villeneuve. L’histoire est à la fois légère et vertigineuse, sans véritable méchant, mais avec pas mal de coups vraiment tordus. Le sexe y est genderfluid, la romance contrariée. On y visite entre autres la préhistoire, les derniers jours de l’univers, Londres au XIXe siècle et Londres dans une réalité parallèle… Tout cela nous ferait donc une bien bonne série HBO, quelque chose tenant à la fois de Game of Thrones et d’Avenue 5; de Zardoz et de La Guerre des Mondes, celui de 1953. De la science-fiction décontractée, à la Mandolorian. En plus adulte. Ce qui nous changerait tellement… Ho, de la science-fiction adulte! Just do it, please!

En ce moment, j’écoute beaucoup un faux album vraiment bon: Love at Psychedelic Velocity par The Human Expression. C’est en fait une compilation, une première fois sortie en CD en 1994, et qui est depuis régulièrement ressortie en vinyle. The Human Expression est un groupe californien qui n’a pas duré: formé en 1966, séparé dès l’été 1967, faute de ventes satisfaisantes. Leur oeuvre complète tient donc sur trois singles, trois faces B et quelques démos. Comment ça sonne? Et bien, disons que les très actuels Allah-Las sont à ces antiques Human Expression ce que le porte-serviettes en promo actuellement dans les magasins Action est au design milanais des années 1960. Rien que ça, ouais. Donc, de la pure matière à légendes!

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En plus récent, en plus Black Lives Matter et en beaucoup plus jazz, je lève aussi un gros pouce devant l’album Shaman d’Idris Ackamoor & The Pyramids. Une petite bombe… et que la pochette, dessinée par l’artiste japonais Tokio Aoyama, descende en droite ligne de la ligne Moebius/Druillet ne rend le plaisir que plus grand encore! Troisième miel pour oreilles de ces trente derniers jours: l’album de Jarv Is et tout spécialement le morceau Save The Whale. Sauvez la baleine, oui. Goûtez-y aussi, si vous en avez l’occasion, vu que c’est encore plus excellent que toute la carrière de Jarvis Cocker. Ce sera tout pour cette semaine. Merci!

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