Critique

[Critique ciné] Tlamess (Sortilège), un film-odyssée vraiment gonflé!

Nicolas Clément
Nicolas Clément Journaliste cinéma

Le cinéaste tunisien Ala Eddine Slim invite à une transe cinématographique doublée d’un retour à l’état de nature.

Film présenté à la Quinzaine des Réalisateurs cannoise en 2019 et débarquant aujourd’hui en Belgique à l’initiative du cinéma Galeries à Bruxelles dans le cadre de la cinquième édition de son incontournable festival L’Heure d’Hiver, consacré cette année à Tunis, Tlamess (Sortilège) d’Ala Eddine Slim prend racine au coeur même du désert. Dans une caserne militaire, un jeune soldat s’y voit octroyer une permission d’une semaine suite au décès de sa mère. Il ne reviendra pas. Commence alors une chasse à l’homme qui l’amènera à fuir vers la montagne. Ce n’est que le début d’une étrange odyssée aux résonances mythiques. Au terme d’un plan-séquence fou bravant la nuit avec virtuosité, le film, lente errance initiatique et hallucinée, laisse derrière lui la civilisation et annonce la couleur: son ambition sera plastique, et expérimentale, ou ne sera pas. Devant la caméra d’Ala Eddine Slim, l’audace toujours est de rigueur. Et la lune bien pleine invite au spectacle répété d’intenses métamorphoses…

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Oiseaux-Tempête

Objet de cinéma patient, attentif aux détails, Tlamess n’est pas un film facile. Il faut d’abord s’accrocher et le mériter. Mais à mesure que son protagoniste s’enfonce au plus profond de la forêt, le deuxième long métrage de fiction du Tunisien Ala Eddine Slim, révélé il y a deux ans avec le déjà très jusqu’au-boutiste The Last of Us, fait honneur à son titre français: envoûtant, c’est un film-sortilège qui déroule ses charmes et ses maléfices en faisant fi des conventions du cinéma narratif. Un serpent géant y croise la route d’une femme croqueuse de pomme face à un monolithe noir sur fond d’allégories multiples, qu’elles soient d’inspiration religieuse ou purement cinématographique. C’est un film de contrebande, de résistant farouche aux sirènes normatives, étonnant, mystérieux, exigeant, opaque parfois, pas dénué de maladresses peut-être mais qui ose constamment des choses. Comme quand ses deux anti-héros revenus à la vie sauvage communiquent en silence, d’oeil à oeil, des sous-titres s’inscrivant au coeur de leurs rétines dans une alternance de gros plans qui captent l’essentiel.

Expérience cinématographique de peu de mots, Tlamess n’en invente pas moins des mondes sonores en soi, bien aidé en cela par la terrassante BO composée pour l’occasion par les Français d’Oiseaux-Tempête, collectif post-rock volontiers bruitiste aux influences jazz et orientales. Entre nappes synthétiques inquiétantes et guitares rageuses, saturées, leur musique d’apocalypse multiplie les vénéneuses incantations jusqu’à l’hypnose drone, achevant de faire de Tlamess un infernal voyage dont il est impossible de ressortir indemne.

Drame d’Ala Eddine Slim. Avec Abdullah Miniawy, Souhir Ben Amara, Khaled Ben Aissa. 2h. Sortie: 11/03. ****

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