Bar Bahar, ces regards électrifiants sur le monde arabe

Bar Bahar (Je danserai si je veux) de Maysaloun Hamoud © DBG
Lola Contessi Stagiaire

Le film palestinien Bar Bahar frappe au coeur des tabous de la société israélo-palestinienne. Avec ses personnages explosifs, ses scènes de vie et son contexte socio-politique, il s’inscrit dans la ligne de ces films qui offrent une perspective vivifiante sur le monde arabe.

L’homosexualité, l’indépendance féminine, le viol, la drogue, l’alcool, la cohabitation des chrétiens et des musulmans… La création de Maysaloun Hamoud, Bar Bahar (Je danserai si je veux), décrit une rencontre-choc et touche aux tabous du monde israélo-palestinien. Leïla et Salma sont deux jeunes femmes indépendantes qui s’amusent dans un Tel-Aviv clandestin. La première fume comme une camionneuse, boit et profite de la vie nocturne sous-terraine. La seconde quitte ses jobs sur des coups de tête, porte un piercing, expose ses tatouages et n’hésite pas à amener sa petite amie au dîner de famille durant lequel elle doit rencontrer son futur mari. Nour, voilée et promise à un mari très religieux, va faire intrusion dans leur univers déjanté. Ebahie, elle va d’abord rejeter cette culture jeune et rebelle, avant de s’en inspirer pour revendiquer elle aussi sa part d’indépendance.

Plutôt que d’adopter un point de vue directement politique, la réalisatrice décrit la vie quotidienne de la jeunesse de Tel-Aviv. De nombreux artistes affirment qu’une véritable révolution culturelle et sociologique a lieu dans cette ville israélienne. La bande-annonce de Bar Bahar sent elle aussi la liberté. Une première projection belge est prévue ce mercredi en présence de l’actrice Shaden Kaboura aux Cinéma Galeries de Bruxelles.

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On compare déjà Bar Habar au film Personnal Affairs de Maha Haj, pressenti l’année dernière pour le prix Un Certain Regard au Festival de Cannes. Un vieux couple qui ne se comprend plus, un fils écrivain à la recherche de l’amour, un autre exilé en Suède… La réalisatrice palestinienne y dressait le portrait d’une famille palestinienne un peu perdue et attachante. Là encore, le conflit israélo-palestinien n’apparaissait qu’en toile de fond, à travers les frontières et les gardes armés.

Si le cinéma palestino-israélien semble en pleine expansion, il n’est pas le seul. Le Pakistan se lie à l’industrie cinématographique belge, française et luxembourgeoise dans le film Noces prévu pour le 8 mars prochain. Réalisé par Stephen Streker (retrouvez son double portrait dans le Focus du 3 mars prochain), il décrit le déchirement d’une jeune fille pakistanaise exilée en France qui refuse de se plier aux traditions et de se marier à un homme qu’elle n’a pas choisi. En 2015, Nabil Ayouch traitait pour la première fois de la prostitution marocaine dans Much Loved. Dans Dégradé, les frères Nasser cristallisaient quant à eux les tensions sociales et les conflits armés entre le Hamas et le Fatah dans un salon de beauté de Gaza. On se penche sur 3 films qui brisent les tabous du monde arabe et montrent la vie derrière les enjeux politico-religieux.

Wadjda d’Haifaa Al-Mansour

Le premier long-métrage produit par l’Arabie Saoudite est celui d’une femme. Réalisé par Haifaa Al-Mansour, il sortait en 2013 dans nos salles. Wadjda, c’est le nom de sa jeune héroïne, qui du haut de ses 12 ans refuse d’endosser le rôle de femme qu’une société fondée sur une loi religieuse rigide et contraignante veut lui donner. Les pieds sur terre et dans ses baskets, la fillette tente par tous les moyens d’acquérir le vélo dont elle rêve tant. Elle est pour cela prête à étudier par coeur les versets du Coran et à remporter le premier prix du concours organisé entre les écoles du pays. Quand elle parvient finalement à se faire offrir le jouet de ses rêves, elle fait face à un tout autre problème: dans son village, les filles ne peuvent pas faire de vélo. Cette comédie douce-amère explique avec la simplicité d’un enfant les contraintes auxquelles les femmes sont quotidiennement soumises en Arabie Saoudite.

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Mustang de Deniz Gamze Ergüven

Salué au Festival de Cannes et acclamé à la cérémonie des Césars, le premier film de Deniz Gamze Ergüven a fait mouche. Il décrit une Turquie entre deux feux: en marche vers le progressisme et une reconnaissance relative de l’indépendance des femmes, mais encore profondément régulée par le patriarcat et les traditions. Elles sont cinq soeurs, jeunes et fougueuses qui s’amusent de tout et jouent avec les garçons. Mais une rumeur se répand et met un terme à leurs jeux d’enfants: elles auraient fricoté avec des garçons sur la plage. Il n’est plus temps de rire, les fillettes sont cloitrées dans la grande maison de bois de leur grand-mère et préparées pour leur futur mariage. La rébellion qui gronde dans ce gang de filles saura-t-elle empêcher l’inévitable?

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Eyes Wide Open d’Haim Tabakman

Aaron est juif orthodoxe et vit à Jérusalem avec sa femme et ses enfants. Le quotidien de ce boucher se partage entre le travail et la prière, jusqu’à ce qu’un jeune homme nommé Ezri ne fasse irruption dans sa vie et dans son magasin. Tombant amoureux de son apprenti, Aaron doute de sa foi et s’interroge sur la religion judaïque. Bientôt, il entame avec Ezri une relation passionnée qui ne passe pas inaperçu dans le quartier. Les voisins qu’il croyait être ses amis se retournent alors contre lui, mettant sa famille au ban de la société. Haim Tabakman traite d’amours rendus impossibles par les contraintes religieuses et évoque avec empathie l’un des tabous de la société israélienne, l’homosexualité.

A travers ces films, c’est un cinéma bien vivant qui s’exprime. Il préfère le rire à la morosité et joue du quotidien pour distiller avec subtilité des problématiques politiques et sociales essentielles. Profondément ancré dans son contexte de production, il s’en émancipe pourtant afin de porter sur lui un regard électrifiant. Pour ces réalisateurs, le cinéma reste toutefois une activité à risque, surtout quand il se fait critique. Maysaloun Hamoud aura ainsi reçu plusieurs menaces de mort après la diffusion de Bar Bahar. Comme une flamme naissante, le cinéma du monde arabe n’est pas à l’abri du vent, mais il brille et chauffe tant qu’il le peut.

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