Visa pour l’image: « C’est devenu impossible de vivre exclusivement du photojournalisme »

Le 7 septembre dernier, les photojournalistes, présents à Visa pour l'image, ont soutenu Shahidul Alam, journaliste arrêté au Bangladesh au mois d'août. © AFP PHOTO / VISA POUR IMAGE/ MAZEN SAGGAR

À Perpignan, le Festival International du Photojournalisme bat son plein depuis le début du mois. En près de 30 ans, l’évènement perpignanais se positionne en plaidoyer du photojournalisme dans tous les sens du terme. On fait le point avec son directeur, Jean-François Leroy.

Pour les initiés, c’est devenu un rituel. Pour les autres, une véritable plongée dans les réalités du monde. Notre monde. Très exactement, celui dans lequel nous vivons. Le photojournalisme nous offre l’opportunité de le voir tel qu’il est, sans artifices. En 1989, alors que le genre journalistique connaît quelques premières difficultés, un évènement viendra porter cette cause sous l’impulsion de Roger Thérond, directeur de la rédaction de Paris Match à l’époque. « La première édition a été particulière, car il y a eu de grands moments d’émotions. On a fait venir Alberto Korda avec son célèbre portrait de Che », se souvient Jean-François Leroy, le directeur du festival. Les années passent et l’évènement devient une véritable pépinière pour la profession.

À chaque nouvelle édition, des images racontant l’actualité sous toutes ses formes. Si le monde s’est considérablement transformé depuis trois décennies, la photo n’en demeure pas moins fondamentale pour capter notre société: « qui peut témoigner les évènements mieux qu’un photographe? Vu les évolutions que nous avons connues ces trente dernières années, les photographies sont plus importantes que jamais. Pour moi, elles sont essentielles et le resteront », détaille le directeur de Visa pour l’image. Cependant, paradoxalement à la volonté de décrypter l’image par le cliché, la profession de photojournaliste se retrouve mal en point.

Jean-François Leroy, directeur du festival Visa pour l'image, le 6 septembre dernier.
Jean-François Leroy, directeur du festival Visa pour l’image, le 6 septembre dernier. © AFP

En l’occurrence, les rédactions accordent de moins en moins d’importance à ce versant journalistique tant au niveau du timing pour réaliser les reportages qu’au niveau financier. Comme l’explique Jean-François Leroy, « les deux sont liés. Il y a moins de productions. Quand il y en a, on leur donne moins de temps. Il y a moins d’argent aussi donc forcément, c’est le serpent qui se mord la queue. Une chose en entraîne une autre. Il est donc difficile pour les photojournalistes de vivre de métier. » Effectivement, les premiers touchés sont les photojournalistes eux-mêmes qui ne peuvent plus vivre uniquement des dépens du domaine de la presse. « Aujourd’hui, un jeune photographe, il faut qu’il fasse d’autres choses à côté. Il ne peut plus vivre exclusivement du journalisme. C’est devenu impossible de nos jours. Il en existe encore quelques dizaines dans le monde qui y arrivent, mais c’est tout », constate le directeur du festival.

« Nous sommes prêts à soulever des montagnes »

Le manque de moyens octroyés dans le domaine du photojournalisme aurait pu, par ailleurs, toucher cette nouvelle édition de Visa pour l’image. Jean-François Leroy a reconnu la difficulté de faire vivre cet évènement gratuit (il faut le rappeler) à résonnance mondiale: « Non, ce n’est pas toujours facile. C’est vrai, mais on a réussi. On se bat depuis trente ans pour parvenir à monter ce festival, mais tant qu’il y aura la passion de l’équipe et de moi-même pour le réaliser. Nous sommes prêts à soulever des montagnes. » Etrange et contradictoire lorsque l’on sait que, depuis ses débuts, Visa pour l’image attire un nombre croissant de visiteurs, à savoir 200.000 par an en moyenne. « Cette année, nous sommes obligés de refuser du monde », s’étonne la tête pensante de l’évènement.

1.0? @veroniquedeviguerie talks about access while photographing in #Yemen.

Video: @alexdrhtvisapourlimagehttps://www.instagram.com/visapourlimage5103517801863993547049876466_510351780Instagramhttps://www.instagram.comrich658

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L’effet « anniversaire » du festival peut, en partie, expliquer cette dynamique. Il n’empêche que la sélection des reportages s’avère éclectiques et particulièrement en phase avec l’actualité, comme peuvent en témoigner Apatrides, abandonnés et rejetés: la crise des Rohyngas de Paula Bronstein ou Luis Tabo pour Elections au Kenya, récemment récompensé au sein du festival avec le prix de la ville de Perpignan Rémi Ochlik. D’ailleurs, le Visa d’Or Paris Match News a été remis à Véronique de Viguerie pour Yemen: la guerre qu’on vous cache. Enfin, la Belgique n’est pas en reste avec Valentine Van Vyne et Olivier Papegnies qui se voient attribuer le Visa d’Or de l’information numérique pour Koglweogo, Miroir d’une faillite d’Etat, diffusé par La Libre cette année.

Mostefa Mostefaoui

Visa pour l’image, jusqu’au 16 septembre à Perpignan. www.visapourlimage.com

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